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APPENDICE


et que ce rapport fut transmis ensuite par Mercier à la section de statistique[1]. Mais ce document, ajoute-t-il, n’a plus été retrouvé aux archives de cette section. Il ne figura pas au dossier communiqué, en 1898, à la Cour de cassation par le ministre de la Guerre. Mercier ni Boisdeffre ne le mentionnent dans aucune de leurs dépositions.

Cette pièce, en effet, comme tant d’autres, a été détruite par Henry, de sa propre initiative, ou, plus probablement, par ordre de Gonse ou de Boisdeffre, en 1897, à la veille de la révélation du nom et du crime d’Esterhazy.

Elle fut remplacée au dossier par une note que Du Paty fut invité à rédiger de mémoire[2], et qu’il data du 24 septembre 1897. Du Paty déclare que cette note lui fut demandée dans un but « dont il ne se souvient plus ».

Le but, qu’oublie Du Paty, apparaît clairement. Il s’agissait de substituer, dans le dossier dit « des aveux », un récit mensonger à un récit sincère.

Dans son compte rendu du 31 décembre 1894, Du Paty racontait tout naturellement qu’il avait parlé lui-même à Dreyfus des attachés militaires étrangers, car le prisonnier n’ignorait pas qu’il avait été accusé d’avoir trafiqué avec le colonel de Schwarzkoppen. Le récit du 24 septembre 1897 est établi, au contraire, pour déduire un aveu indirect du dialogue qui en fait l’objet.

Voici ce récit :

« Au cours de l’information préliminaire de l’affaire Dreyfus, le terme « attaché militaire » n’a été ni écrit, ni prononcé. On s’est servi uniquement de l’expression « agent d’une puissance étrangère », laquelle figure seule dans le jugement. Cependant le mot « attaché militaire » a été prononcé une fois, postérieurement à la condamnation, dans les circonstances suivantes.
  1. Rennes, III, 513, Du Paty.
  2. Cass., III, 180, Ballot-Beaupré : « Le compte rendu détaillé qu’invoque M. Du Paty de Clam ne figure pas au « dossier des aveux » communiqué ; par le ministère de la Guerre ; il y est remplacé par une note que M. Du Paty de Clam lui même rédigea trois ans plus tard, le 24 septembre 1897 c’est la pièce n° 252. »