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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


papier pelure, non signée et non datée. » — Il dit ailleurs : « Les éléments matériels de l’accusation consistent en une lettre missive. » — Quand l’officier de police judiciaire l’a saisie pour son enquête, le général Gonse a déclaré « qu’elle a été adressée à une puissance étrangère, et qu’elle lui est parvenue, mais que, d’après un ordre formel du ministre, il ne peut indiquer par quels moyens ce document est tombé en sa possession ».

Le bordereau n’était pas parvenu à Schwarzkoppen, puisqu’il avait été volé, intact, avant de lui être remis.

Il fut attribué aussitôt à « un officier qui devait appartenir à l’artillerie, trois des notes ou documents envoyés concernant cette arme ». On découvre l’écriture de Dreyfus. Le ministre prescrit une expertise.

Tout de suite, D’Ormescheville s’applique à discréditer Gobert, dont le rapport a été négatif. Il affirme que son expertise a duré du 9 au 13 octobre[1], alors que le bordereau ne fut remis à Gobert que le 11 au soir. Erreur intentionnelle qui, transformant en une expertise de quatre jours, une expertise de trente-six heures, permet d’insinuer que Gobert se livra à quelques louches manœuvres. « Quelques jours après, Gobert demanda au général Gonse le nom de la personne incriminée… Peu de jours après, il fut invité à remettre ses conclusions et les pièces qui lui avaient été confiées, la prétention qu’il avait manifestée étant d’autant plus suspecte qu’elle était accompagnée d’une demande d’un nouveau délai. » Cette demande n’a pas été faite, et, du 9 au 13 au matin, voilà beaucoup de jours !

Pour écarter toute idée de précipitation, D’Ormes-

  1. « M. Gobert reçut de M. le général Gonse, le 9 octobre, des documents devant lui servir à faire le travail qui lui était demandé. »