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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS

XX

Le dossier fut remis à Bertillon, « dans la matinée du 13 octobre[1] », à la Préfecture de police. Le soir même, il déposait son rapport, « son avis lui ayant été demandé pour la même journée[2] ». Il avait eu « dix heures » pour faire son travail, « jusqu’à six heures du soir[3] ».

Bertillon n’était pas expert, il n’était pas qualifié pour une vérification d’écriture. C’est comme chef du service anthropométrique, qui comprend la photographie judiciaire, qu’il avait été désigné par Gobert à Gonse. Cependant, il n’hésita pas à accepter une mission qu’il aurait eu le devoir de décliner.

Du Paty lui remit des pièces de comparaison[4] et une photographie du bordereau. Bertillon ne « réussit » à se procurer l’original que dans l’après-midi[5].

Pourquoi Gonse et Du Paty n’avaient-ils remis à Bertillon qu’une photographie ? Était-ce dans l’espoir qu’il conclurait plus facilement à l’identité des écritures, s’il n’avait point la pièce même sous les yeux ?

Bertillon réclama, honnêtement, l’original.

Quand Gobert vint, pour la première fois, dans le bureau de Gonse, on a vu les officiers entourer l’expert et l’exciter à leur faire, tout de suite, la réponse que leur fébrile impatience attendait de lui. Combien dut être

  1. Rennes, II, 321, Bertillon.
  2. Ibid., 322.
  3. Mercier avoue « cette rapide expertise » de Bertillon ; mais il n’en est convenu qu’à Rennes (I, 89). Il avait cherché, en 1894. à la dissimuler aux juges de Dreyfus (Voir plus loin, p. 313).
  4. Cass., I, 490. — Bertillon, à Rennes, ne parlera plus de Du Paty.
  5. Rennes, II, 322, Bertillon.