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CAVAIGNAC MINISTRE

IX

Il eût fallu à Cavaignac, comme à Roget, toute la perspicacité qui avait manqué aux autres dupes d’Henry, depuis Picquart jusqu’à Pellieux, pour ne pas glisser à ce nouveau piège du fourbe. Cependant, ici encore, le ministre voulut s’assurer des choses par lui-même, quelle que fût sa confiance dans le chef de son cabinet, et, d’abord, il fit venir Du Paty.

La confession de Du Paty n’était pas pour diminuer les embarras de Cavaignac. S’il protesta qu’il n’était pour rien ni dans l’affaire des faux télégrammes ni dans celle du document libérateur[1], il convint de l’entrevue de Montsouris et de ce qui s’en était suivi, mais comme de la chose la plus naturelle du monde, et, surtout, il affirma que Boisdeffre et Gonse avaient non seulement connu, mais provoqué ses relations avec Esterhazy. Sauf qu’il lui répugnait, « même pour se disculper », de « se faire le délateur d’Henry », et qu’il se tut des lettres à Félix Faure, « il dit tout[2] ». — Ainsi la réserve de Du Paty ne contribua pas moins que la crédulité de Roget à réduire, aux yeux de Cavaignac, le rôle d’Henry à presque rien.

Pourtant, comme Cavaignac accusait formellement son cousin d’avoir remis lui-même le document libérateur à Esterhazy, Du Paty déclara qu’à sa connaissance un autre officier avait été mêlé aux intrigues avec Esterhazy et, probablement, à cet incident ; mais il ne

  1. Instr. Tavernier, 13 juillet 1899, Du Paty.
  2. Conseil d’enquête Esterhazy, 27 août 1898 (Cass., II, 185) : Enq. Renouard, 9 sept. 1898 (Cass., II, 196) ; Instr. Tavernier, 13 juillet 1899, Du Paty. — Cass., II, 28, Cuignet.


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