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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


s’occuper de politique »[1]. — Le duc, lent et lourd (à demi Espagnol par sa mère), de plus mal impressionné depuis le refus de Déroulède, serait volontiers resté à Turin[2] et n’était revenu qu’à regret à Bruxelles, où Buffet, Chevilly, Lur-Saluces et Lecourt-Grandmaison lui rendirent compte, entre deux trains, de ce qu’ils avaient combiné[3]. — Comme il fallait de l’argent pour subvenir, éventuellement, aux premières nécessités, le député Ramel, la plus forte tête du parti et le plus homme d’action, en sa qualité d’ancien bonapartiste, s’occupa d’en réunir. La Monbazon de cette nouvelle Ligue, la baronne de Waru (veuve d’un professeur de chinois, mariée en secondes noces à un jeune royaliste très militant, et toujours en route avec lui, entre Bruxelles et Paris) trouva deux cent mille francs en une matinée. Moitié de la somme lui fut versée par une protestante, la baronne d’Adelswärd, qui informa sur l’heure le duc de la générosité dont elle avait fait preuve

  1. 21 février 1899. — Haute Cour. I, 115, rapports du brigadier de gendarmerie Montagnon (des 24 et 25 février 1899). — VII (Dépositions), 32, Montagnon ; 35, docteur Duréaux : « Tel est le récit que j’ai fait au brigadier ; il est l’expression de la vérité et je n’ai rien à y ajouter non plus qu’à en retrancher. » — Buffet, à l’audience publique, dit qu’il fut étranger aux démarches faites à Longuyon : « Peut-être le Prince les a-t-il faites ? » Précédemment il avait avoué : « Le jour où j’aurai télégraphié au Prince que tous seront à leur poste, il peut rentrer par vingt points de la frontière avec l’assurance de trouver quelqu’un pour le recevoir. » (16 novembre 1899.) Buffet ajouta que le duc était trop surveillé à Bruxelles pour pouvoir rentrer par la frontière belge, ce qui expliquait sa précédente dépêche relative à Luxembourg (voir p. 583) et le choix de Longuyon. À l’audience du 23, Duréaux maintint son récit et, de même, Montagnon, le 24.
  2. Dépêche à Chevilly. (II, 59) Le duc arriva le 20 février à Bruxelles.
  3. II, 4, Rapport Hennion, d’après son agent à Bruxelles. — Haute Cour, 16 novembre 1899, Buffet : « Nous ne pouvons réussir que par un attentat… etc. »