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MORT DE FÉLIX FAURE


nelles du pays. Vive la République plébiscitaire ! » Si quelque résistance se produit, soit des républicains « parlementaires » et des socialistes, soit des royalistes, le nouveau Gouvernement aura vite fait de l’écraser[1]. « Nous veillerons au maintien de l’ordre et à la défense des libertés reconquises[2]. »

Ces sortes d’opérations, quand elles échouent, paraissent ridicules. Sa prose et son crime, Déroulède les calquait exactement sur les attentats et sur la littérature des Bonaparte.

Plus il réfléchissait (en s’excitant, comme il en avait l’habitude, par des discours et la boisson), plus son plan lui paraissait bien combiné : les ligueurs, « ses soldats », étaient tout enrôlés, disciplinés, entraînés, exercés, depuis plusieurs mois qu’ils le pressaient, le devinaient, obéissaient « à un signe, à un regard[3] » ; l’argent non plus ne manquait pas, réuni sous des prétextes divers ou pour faire le coup[4] ; rien à craindre de Dupuy ni de Freycinet ; la veille de la mort de Faure, Déroulède avait écrit à son ami Galli : « Dupuy est homme à être notre homme[5] » ; il était probable que Dupuy recom-

  1. Instr. Pasques, 36, Habert.
  2. Déroulède donna lui-même lecture de cette proclamation, où éclate tout son plan, à la Haute Cour. (20 novembre 1899.) « Cette proclamation devait être affichée après le renversement d’un certain gouvernement… Par qui cette proclamation est-elle signée ? Par qui devait-elle l’être ? Peu importe ; les termes mêmes vous prouvent qu’elle pouvait l’être par de bons républicains. » — Ces » termes » indiquent, assez nettement, que la proclamation ne devait pas être signée seulement par Déroulède.
  3. Instr. Pasques, 32, Déroulède.
  4. Rapport Hennion, « février 1899 : Rapport Blanc, mars 1899 : « Déroulède reçut quelques jours avant son équipée une somme de 50.000 francs. La Ligue reçut également des fonds de M. Boni de Castellane, député royaliste. »
  5. Lettre du 15 février. (Galli, loc. cit., 124.)