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MORT DE FÉLIX FAURE


pendant qu’il était au pouvoir[1]. Quand il se transporta à l’Élysée, il y trouva les autres médecins, dont le pronostic fut le même que celui de Lannelongue, et la famille, qu’on avait enfin pu avertir[2], Mme Faure, abîmée dans la douleur, ses filles en prières. Il prit la main du Président, lui demanda s’il le reconnaissait, et ne reçut aucune réponse. Par acquit de conscience, les médecins avaient essayé de quelques révulsifs, mais rien n’y fit. Le pouls s’affaiblissait de minute en minute, et l’œil, vitreux, ne voyait plus. Un garde, qui fut dépêché au curé de la Madeleine[3] et qui avait compris que le temps pressait, arrêta le premier prêtre qu’il rencontra dans la rue, l’abbé Renault, professeur à la maîtrise de Notre-Dame et aumônier du Dépôt, et lui dit de courir à l’Élysée. L’abbé ne put administrer que le sacrement de la pénitence, quelques minutes avant la fin (10 heures du soir). L’abbé Herzog arriva trop tard avec les saintes huiles[4].

La nouvelle, aussitôt connue, télégraphiée partout, causa beaucoup moins d’émotion que de surprise. On croyait toujours à sa robuste santé ; le secret sur la

  1. Il tint le même propos à Le Gall.
  2. À 8 heures. (Note officielle de l’Agence Havas, du 16 février 1899, minuit.)
  3. Le Gall affirma que Faure, avant de tomber dans le coma, « entre 7 heures et demie et 8 heures », avait demandé un prêtre. (Note du 21 février.) L’abbé Herzog, curé de la Madeleine, raconta, de son côté, qu’il fut appelé vers 8 heures et demie à l’Élysée, qu’il y resta environ une heure sans voir le malade, que « les médecins ne croyaient pas à un danger immédiat », et qu’il retourna alors à son église « pour y faire son heure d’adoration perpétuelle ». (Éclair et Libre Parole du 25.) C’est alors que le garde lui fut dépêché à nouveau et rencontra l’abbé Renault.
  4. Récit de l’abbé Renault, dans le Temps du lendemain. L’acte de décès porte que Félix Faure, âgé de cinquante huit ans, mourut à 10 heures.