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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


plique à des documents extrêmement importants. » Ceux que vise le bordereau « traduisent la vie même de l’État-Major pendant les mois de juillet et d’août 1894 ». « C’était l’ennemi installé là, au cœur même des secrets de la défense nationale, et y puisant à pleines mains. » Vingt fois, il revint sur ces prétendus secrets : le frein hydraulique du 120, les troupes de couverture, le manuel d’artillerie.

Bard et Manau avaient paru mettre en doute l’authenticité du bordereau. Il releva cette erreur, s’appuyant sur « l’honorabilité » de l’agent qu’on appelait « la voie ordinaire », et sur la déclaration d’Henry, « qui aurait été incapable de fabriquer un tel document ». Le bordereau est arrivé « en fragments », avec d’autres pièces. Comme Mercier, qui en avait rejeté le tort sur d’Ormescheville, Cavaignac convenait que le bordereau n’était plus du printemps de 1894. « Avec une certitude presque mathématique », les documents eux-mêmes nomment Dreyfus : « d’abord parce que, sur cinq des sujets traités, trois sont relatifs à l’artillerie… » ; ensuite, parce que ces sujets, si variés, ont été précisément étudiés par les stagiaires dans les bureaux de l’État-Major. » — Comme il écarte la question d’écriture, il n’y a pas plus de raison, dans ce système, d’attribuer le bordereau à Dreyfus qu’à ses camarades d’alors, Lemonnier, de Fonds-Lamothe, Maumet, Souriau et Putz, dans les mêmes conditions techniques et professionnelles que lui, stagiaires comme lui à l’État-Major, artilleurs comme lui[1]. — « Après l’arrestation de Dreyfus », une seule fuite a été constatée, mais qui « devait se reporter à une époque antérieure ». Cavaignac applique les pièces

  1. C’est ce que je fis observer, le 7 avril 1899, dans une lettre ouverte à Freycinet.