Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1904, Tome 4.djvu/363

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
359
CHAMBRE CRIMINELLE

À l’État-Major, Freycinet remplaça Renouard par le général Brault, son ami personnel et celui de Galliffet, le créateur de la fameuse « division de fer » à Nancy.

Tout cela était de nature à fort rassurer les revisionnistes.

Les amis de la paix extérieure le furent également. C’était l’immense majorité de la nation, aigrie contre l’Angleterre, mais sourde, de propos très délibéré, aux excitations belliqueuses des nationalistes et de quelques officiers dont le duc de Broglie disait qu’ils pousseraient moins vivement à une guerre qui ne serait pas maritime. On savait l’énormité des forces anglaises, notre infériorité certaine, malgré les tardifs efforts du ministère de la Marine. (Les dépenses qui furent engagées alors et jusqu’à la fin de l’année pour parer au plus pressé, une soixantaine de millions, le furent sans un vote des Chambres, d’accord avec leurs présidents et avec les rapporteurs généraux des commissions financières.) Delcassé avait demandé à Sir Edmond Monson, que l’un des officiers de Marchand fût autorisé à venir au Caire, où il recevrait des instructions[1]. Cela fut accordé. C’était un grand mois de gagné, c’est-à-dire le temps pour les esprits de réfléchir et de se résigner. Le capitaine Baratier fut ensuite mandé à Paris[2] ; il fit route avec le Sirdar lui-même, que son gouvernement avait également convoqué. Celui-ci ne se taisait ni de son admiration pour la mission française, ni de son étonnement qu’une pareille entreprise eût été tentée et exécutée avec d’aussi faibles moyens, 120 hommes, dont une douzaine d’Européens, campés maintenant sur une étroite bande de terre en-

  1. 30 septembre 1898. (Livre Jaune.)
  2. 20 octobre.