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BRISSON

table sacrifice, Brisson l’on remercia, mais sans l’inviter à se préoccuper d’un successeur, les circonstances étant telles qu’un poste de cette importance ne pouvait pas rester vacant ; et Zurlinden non plus n’y fit allusion, en bon tacticien qui, avant de livrer bataille, s’est assuré sa retraite[1].

Brisson, tout heureux, respira[2]. Faure, lui aussi, ne fut pas mécontentent de sa journée.

V

L’un des effets les plus communs de la servitude militaire et de l’ambition de parvenir, c’est l’habitude de faire du zèle. Les meilleurs la conservent, même quand ils sont devenus chefs. Le jour suivant, au conseil, Zurlinden dit spontanément que « l’on allait sans doute et très vite à la revision » et, se tournant vers le ministre de la Marine, qu’il y aurait avantage à désigner un navire pour ramener le condamné[3].

  1. Brisson dément formellement, dans ses Souvenirs, qu’il eût été entendu entre Zurlinden et lui qu’on ne pourvoierait pas au remplacement du général comme gouverneur de Paris, « afin qu’il put reprendre cette fonction, une fois passée la crise de la Revision ». Mais il « ignore si des pourparlers de ce genre ont eu lieu entre d’autres personnes », c’est-à-dire avec Félix Faure. — Au conseil des ministres du 6, Zurlinden annonça qu’il avait confié l’intérim, en attendant la nomination de son successeur, au général Borius. — Drumont comprit fort bien et s’en expliqua dans son journal. (7 septembre 1898.)
  2. Souvenirs : « Faire la Revision avec lui et par lui, c’était le rêve ; j’ai pu le caresser quelques jours :
    « Heureux celui qui mourut dans ses rêves ! »
  3. 6 septembre 1898. Souvenirs de Brisson« (Siècle du 18 mai 1903) Réponse de Zurlinden.