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ESSAI
SUR LA THÉORIE DES EAUX COURANTES,

PAR M. J. BOUSSINESQ[1]

INTRODUCTION.

L’écoulement des fluides, bien continu dans les espaces capillaires, est tumultueux et tourbillonnant dans les grandes sectionsi. Les fluides se meuvent, de deux manières différentes, suivant, qu’ils coulent dans des tubes très-étroits ou dans des espaces ayant des sections comparables à celles des tuyaux de conduite ou des canaux découverts. Dans le premier cas, leurs mouvements sont bien continus, c’est-à-dire que les vitesses varient graduellement, à chaque instant, d’un point du fluide aux points voisins, et des formules très-connues, données par Navier pour représenter ces mouvements, les régissent avec toute l’approximation désirable, pourvu qu’on ait soin de supposer nulle la vitesse contre les parois mouillées[2]. Mais le coefficient des frottements que dé-

  1. Plusieurs des idées nouvelles que contient ce mémoire, présenté le 28 octobre 1872 (Comptes rendus, t. LXXV, p. 1011), avaient été déjà résumées par l’auteur dans deux Notes des Comptes rendus (t.  LXXI, p.  389, 29 août 1870 ; t.  LXXIII, p.  34 et 101, 3 et 10 juillet 1871) et dans une lecture l’aile à l’Académie le 15 avril 1872 (Comptes rendus, t. LXXIV, p. 1026).
  2. Sur les mouvements bien continus et sur les phénomènes de filtration.Cette supposition d’une vitesse nulle contre une paroi mouillée a été directement confirmée par l’expérience, surtout depuis que M. Duclaux, professeur de chimie à la Faculté des sciences de Clermont, a fait voir que l’alcool coloré contenu dans le tube d’un thermomètre perce une couche d’alcool incolore superposée, quand on vient à chauffer le réservoir thermométrique, plutôt que de la chasser devant elle, et qu’il la traverse, en s’allongeant en forme de cône arrondi à son sommet, de manière à montrer que, dans ce phénomène, les particules liquides un peu éloignées des parois sont les premières et presque les seules à avancer. La dif-