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le robinson suisse.

pas à revenir emmailloté dans des compresses de vin et d’eau salée, qui, malgré la douleur un peu cuisante, qu’elles devaient nécessairement lui causer, n’altéraient en rien sa bonne humeur.

À son retour, nous nous mîmes tous à table, car les chasseurs et nous-mêmes avions assez bien travaillé pour nous sentir en appétit. Quand la première faim fut un peu apaisée, je demandai à Fritz de vouloir bien nous raconter les divers incidents de l’expédition, dont j’étais curieux de connaître les détails.

« En vous quittant, me dit-il alors, nous descendîmes au galop la prairie, et nous arrivâmes bientôt sur une petite hauteur qui dominait dans la savane tous les environs. De là, nous pouvions nous orienter et donner à notre excursion un but plus précis. En regardant devant moi, je vis plusieurs troupeaux d’animaux qui me parurent devoir être des antilopes, des chèvres ou des gazelles. De l’endroit où nous étions, on apercevait notre parc ; je conçus alors l’idée de chasser de ce côté les quadrupèdes inoffensifs que nous avions sous les yeux. Nous prîmes pour cela nos dogues en laisse ; car je sais, par expérience, que les chiens causent à ces animaux sauvages plus d’effroi que les hommes, et nous avançâmes avec précaution pour ne pas les effaroucher.

« À une distance encore assez considérable, nous nous séparâmes. François inclina à gauche, Jack resta au milieu, et moi, monté sur mon onagre, je me dirigeai vers la droite pour ramener dans la bonne direction ceux des fuyards qui tenteraient de nous échapper. Nous marchions avec lenteur et circonspection ; aussi attribuâmes-nous au hasard la fuite de trois ou quatre, plus prudents ou plus avisés peut-être que les autres. Bientôt cependant l’éveil sembla donné parmi nos paisibles adversaires, et aussitôt nous les vîmes s’agiter, les uns dressant les oreilles, les autres levant la tête ; ceux qui étaient couchés sur l’herbe bondissaient tout à coup ;