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le robinson suisse.

vriers de tromper un peu leur faim en suçant des bouts de cannes à sucre. Tout en travaillant nous causions de notre trouvaille.

Fritz pensait que nous avions là une espèce semblable à celle des cochons de Taïti, hauts tout au plus de trois pieds, et il trouvait alors fort naturel que l’équipage du capitaine Cook n’eût pas mis plus de temps à préparer tous ceux qui lui avaient été donnés. Moi, je penchais plutôt pour des cochons chinois ou siamois, et ces conjectures étaient basées sur la grosseur de leur ventre, qui traînait presque à terre. D’ailleurs, cette espèce n’est pas beaucoup plus grosse que les peccaris de Taïti, et se trouve aussi dans quelques contrées de l’Amérique, notamment dans les Antilles et à la Guyane.

Malgré l’activité générale, l’opération prit encore du temps, en sorte que nous laissâmes passer l’heure du dîner ; mes enfants, au lieu de se plaindre, ne firent que redoubler d’ardeur, et ne perdirent rien de leur gaieté. Quand tout fut terminé, nous jetâmes les entrailles aux chiens, qui se gardèrent bien d’en faire fi, et nous chargeâmes notre viande sur la charrette ; mes enfants s’ornèrent de feuillages et de branches vertes, en prirent même quelques-unes en guise de panaches, puis Jack et François montèrent sur les bœufs, Ernest et Fritz dans la charrette, et moi, accompagné des chiens, je servis d’escorte.

En arrivant nous fûmes salués par ma femme, qui nous attendait depuis longtemps. « Comme vous êtes en retard ! nous dit-elle ; le jour est trop avancé pour que nous puissions continuer notre route aujourd’hui. Aussi ai-je tout préparé pour que vous puissiez dormir à votre aise. Mais allons au plus pressé. Le dîner attend depuis longtemps. »

Pour toute réponse je montrai notre gibier à ma femme et lui remis une poignée de cannes à sucre que nous avions cueillies à son intention. « Allons, nous dit-elle, c’est bien aimable à vous de ne pas m’avoir oubliée. Mais quelle