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le robinson suisse.

cher de se blesser dans la chute. Je m’empressai de leur ôter leurs entraves et je leur entourai les pattes et les ailes pour les mettre hors d’état de s’envoler. À la courbure particulière de leur bec, à la forme générale de leur corps, je pensai qu’ils appartenaient au genre pigeon, ce qui me fit d’autant plus de plaisir que déjà je me réjouissais de m’en servir pour peupler mon colombier projeté depuis plusieurs mois. Fritz ne partageait pas mon opinion à leur égard ; il les trouvait trop grands et trop gros pour être des pigeons : « Jamais, me dit-il, je n’ai vu des pigeons de cette taille ni d’un plumage aussi varié ; et puis cette huppe ?

moi. — Je suis presque sûr que cet oiseau à huppe est le pigeon géant des îles Moluques. Certains naturalistes l’avaient rangé autrefois parmi les faisans.

ernest. — Et cet autre aux plumes dorées et brillantes ! Oh ! mais je crois qu’il a mangé des cailloux. Je sens dans son gosier des corps fort durs.

jack. — Des cailloux ! tu veux te moquer de nous. C’est plutôt du maïs qu’il aura mangé. Tiens, tu lui as fait sortir une noix du bec en lui serrant le cou.

moi. — Voyons ; si je ne me trompe, c’est une noix muscade ; d’où vous pouvez conclure que ce pigeon est le pigeon ordinaire des Moluques, grand amateur de muscade et qui en plante dans le désert autant qu’il en mange.

fritz. — Voilà qui me semble très-extraordinaire. Comment peut-il planter les muscades qu’il a mangées ?

moi. — Il ne mange que le brou de la noix, et rejette avec sa fiente, partout où il se trouve, la noix proprement dite, qui ne tarde pas à prendre racine là où elle tombe. L’écorce de la muscade, sorte de peau ou de tissu filamenteux de couleur jaune, est ce qu’on appelle macis ou vulgairement fleur de muscade.

ernest. — Comment ferons-nous donc pour nourrir ces pigeons, si nous les gardons ? Faudra-t-il, à grand’peine,