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le robinson suisse.

cia ou qui avaient plongé leur tête et leurs mains dans les calebasses, les courges et les écales de noix de coco garnies de glu sur les bords. Nous ne devions pas prolonger les souffrances de nos ennemis dans l’intention de nous divertir : dès que je les vis suffisamment pris au piège, je lâchai contre eux nos chiens, qui les mordirent, les blessèrent et en étranglèrent une vingtaine ; nous en tuâmes nous-mêmes une trentaine d’autres à coups de bâton.

Le sol, jonché de leurs cadavres sanglants, présenta l’aspect d’un horrible champ de bataille ; aux aboiements des chiens, aux cris plaintifs des victimes expirantes, à leurs grincements de dents, succéda un silence de mort qui nous fit frissonner malgré nous. Mes fils jetèrent avec dégoût leurs bâtons et détournèrent les yeux de cet affreux spectacle.

« Oh ! mon père, s’écria Fritz, je ne veux plus recommencer un pareil massacre : c’est trop cruel ; le courage me manquerait.

jack. — À chaque singe que j’abattais, je me figurais presque tuer un homme. Et il peut y avoir des gens qui assassinent de sang-froid leurs semblables !

moi. — Allons, mes amis, il faut maintenant nettoyer les chiens, enlever les singes morts, détruire nos pièges, réparer notre cabane, rassembler nos moutons et nos poules dispersés. »

Nous commençâmes par traîner les singes du côté du ruisseau ; après avoir jeté leurs corps dans un ravin assez profond, nous les couvrîmes d’une couche de sable. La cabane fut ensuite lavée avec soin.

Au moment où nous en sortions, nous entendîmes le bruit trois fois répété d’un objet tombant, d’une assez grande élévation, sur le sol ; après quelques minutes de recherche, nous trouvâmes trois beaux oiseaux qui s’étaient pris dans un arbre voisin aux pièges tendus pour les singes. Leurs ailes avaient pu les soutenir assez pour les empê-