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1o Si les Égyptiens eussent inventé leur écriture phonétique à l’imitation de l’alphabet des Grecs ou de l’alphabet des Romains, ils eussent naturellement établi un nombre de signes phonétiques égal aux éléments connus de l’alphabet grec ou de l’alphabet latin. Or, c’est ce qui n’est point ; et la preuve incontestable que l’écriture phonétique égyptienne fut créée dans un tout autre but que celui d’exprimer les sons des noms propres des souverains grecs ou romains, se trouve dans la transcription égyptienne de ces noms eux-mêmes qui, pour la plupart, sont corrompus au point de devenir méconnaissables ; d’abord par la suppression ou la confusion de la plus grande partie des voyelles, en second lieu par l’emploi constant des consonnes Τ pour Δ, Κ pour Γ, Π pour Φ ; enfin par l’emploi accidentel du Λ pour le Ρ, et du Ρ pour le Λ.

2o J’ai la certitude que les mêmes signes hiéroglyphiques-phonétiques employés pour représenter les sons des noms propres grecs et romains, sont employés aussi dans des textes idéographiques gravés fort antérieurement à l’arrivée des Grecs en Égypte, et qu’ils ont déjà, dans certaines occasions, la même valeur représentative des sons ou des articulations, que dans les cartouches gravés sous les Grecs et sous les Romains. Le développement de ce fait précieux et décisif appartient à mon travail sur l’écriture hiéroglyphique pure. Je ne pourrais l’établir, dans cette lettre sans me jeter dans des détails prodigieusement étendus.

Je pense donc, monsieur, que l’écriture phonétique