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ENFANCE

jarretières rondes pour maintenir le mien et je me couchai si contente, que je ne pouvais pas rester tranquille sous mes couvertures. Au réveil, j’eus l’impression saisissante que c’était bien le Jour de l’an ! Il devait être de bonne heure ; le plus grand calme régnait dans la maison. Mon premier souci, naturellement, fut pour le bas. J’hésitais… Si j’allais le trouver vide… Le poteau me le cachait. Mais, ayant rampé jusqu’à lui, je le vis tout bossué et supportant une boîte de carton gris posée à terre. Je me rejetai en arrière, pour respirer, puis je ris et me tordis de joie dans le lit en murmurant : « Y en a ! »

En premier lieu, j’attirai la boîte à moi et enlevant le couvercle, je demeurai saisie, puis gênée devant l’élégante poupée blonde qui me souriait. Je la retirai, cependant, de sa prison et de sentir sous mon étreinte son gros petit corps bourré de bran de scie, mon cœur fondit d’émoi et timidement, je baisai sa joue froide. Puis je touchai ses jambes, ses petits souliers à semelles jaunes et je la baisai encore. Elle portait une robe rose recouverte de chiffon blanc et relevant sa soyeuse chevelure bouclée, je la baisai doucement sur la nuque. Je voulus la faire tenir debout devant moi, et lui prenant les bras, je la forçai de me caresser les joues et alors, saisie d’un transport soudain, je la pressai à l’écraser sur ma poitrine, puis je la couchai sur mon bras et subitement, elle s’endormit. Surprise, je répétai mon geste : invinciblement, dès qu’on la couchait, ses paupières s’abaissaient. C’était trop touchant. Avec d’infinies précau-