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CONTES D’HIER

Dehors, c’est janvier dans toute sa fureur blanche : une poudrerie du diable. Par instants, on ne voit ni ciel ni terre, rien qu’une fine poudre qui s’irise au soleil. Le vent souffle, mugit et balaye la neige aux quatre coins de l’horizon, ou l’amoncelle en bancs énormes, montagnes et collines aux arrêtes vives, entre des espaces nettoyés jusqu’à la glace. Avec cela, un froid intense. Se peut-il qu’il y ait des mortels assez infortunés pour se trouver dehors par ce temps de chien ? Ah ! bien, tant pis ! Car il fait très bon dans les maisons chaudes, jouer aux cartes, fumer la cigarette, ou simplement rêver, comme fait Alice, son enfant qui dort reposant en sûreté sur ses genoux.

La cigarette, c’est votre serviteur qui la fume, avec délices. Ces dames ont permis. J’en savoure la parfum avec une béate volupté, les yeux mi-clos, comme les chats qui ronronnent. Je la regarde de temps en temps, je la secoue au bord du cendrier. J’ai l’impression de faire un geste élégant, quand je l’éloigne de mes lèvres, entre deux doigts, petit bâton blanc, au bout rouge, mystérieux, pour lancer au plafond des volutes