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VEILLE DE NOËL

dans quelque douloureuse méditation. Ce n’était au fond qu’une très vague rêverie, et avant de s’éloigner la malade éprouva le besoin de se justifier encore une fois :

— C’est si vexant, juste la veille de Noël ! Mais vous savez, n’est-ce pas tante, que c’est bien à contre-cœur que je vous abandonne ainsi avec toute la besogne ? J’aimais tant à me mêler à ces préparatifs des Fêtes.

Ainsi qu’elle avait dit, Berthe vint essayer de dormir dans le boudoir, pièce minuscule, mais pourvue d’un sofa sur lequel la malade s’étendit, son châle bien serré sur elle, un coussin sur sa tête, un autre sur son dos et le troisième lui couvrant les pieds. Elle ferma les yeux, et pendant une minute, les élancements douloureux de sa tête se multiplièrent aigus, affolants, puis, comme ils s’apaisaient, ce fut le « mal de cœur » qui la remplit de malaise. Oh ! cet estomac, qu’avait-il donc à la faire souffrir de la sorte ? Elle avait la sensation bizarre que c’était son cœur qui était rendu là-dedans, comme si elle l’avait avalé.

Si seulement elle pouvait dormir ! Elle se réveillerait guérie, elle en avait l’intime conviction.