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LES DÉMOLISSEURS.

gazons en étaient à peine à leur seconde verdure, ses rosiers en fleurs étaient dans toute leur vigueur comme une belle femme de trente ans, et ils étaient chargés de boutons, vain espoir ! quand la rude main de l’architecte est venue les arracher sans pitié et sans plaisir ! Oui, je conçois que tombe Ninive sur Babylone, Tyr sur Memphis, Ilion sur Carthage, Carthage sur Rome, Rome sur le monde ; oui, je conçois la ruine du temps, cette mort lente et acharnée de toutes les grandeurs humaines ; je conçois la guerre qui renverse et qui brûle ; je conçois la rage patiente du temps et la rage furibonde des hommes, mais ce que je ne comprendrai jamais si Dieu m’exauce, c’est cette ruine subite et sans colère qui tombe à chaque instant sur les maisons les mieux fondées et les mieux bâties de cette ville de carton et de plâtre ! ce que je ne comprends pas, c’est qu’on vienne ainsi, de gaieté de cœur, renverser d’épaisses murailles qui n’avaient pas un siècle, briser des