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nimité ; mais elle ne conduisit à aucun résultat pratique. Le Congrès suisse projeté, en effet, n’eut pas lieu, les organisateurs n’ayant pu s’entendre.

Le Congrès avait ajouté à son ordre du jour, comme je l’ai dit, une question de plus, celle d’un organe à créer pour la Fédération. Cette question s’était trouvée soulevée par une proposition du citoyen Claris, proposition que le délégué Joukovsky s’était chargé de transmettre au Congrès. Claris, propriétaire et directeur du journal la Révolution sociale, offrait à la Fédération jurassienne d’insérer dans son journal tous les articles et documents qu’elle lui enverrait, se réservant, sous sa propre responsabilité, la direction de la partie du journal qui ne serait pas absorbée par les communications officielles de la Fédération. L’offre de Claris fut acceptée ; le Congrès décida d’inviter les Sections composant la Fédération, et les membres de ces Sections, à prendre le plus grand nombre possible d’abonnements à la Révolution sociale ; et il nomma une délégation chargée spécialement de veiller sur la partie du journal qui serait réservée à la Fédération[1]. En conséquence, à partir de son cinquième numéro (23 novembre 1872), la Révolution sociale devint l’organe de la Fédération jurassienne.

On a vu (p. 215) que, dès le mois de septembre, notre Comité fédéral s’était préoccupé de la rédaction d’un Mémoire qui serait adressé « à tous les centres internationaux », et avait songé à me demander de me charger de la rédaction de cet exposé. Il crut devoir soulever la question devant le Congrès de Sonvillier ; et, sur sa proposition, le Congrès donna formellement au futur Comité fédéral jurassien le mandat de pluplier un Mémoire destiné à éclairer l’opinion des autres Fédérations de l’Internationale sur les faits qui avaient amené la scission de l’ancienne Fédération romande. C’est en vertu de cette décision que — le Comité fédéral jurassien, une fois constitué, ayant nommé une commission dont je fus l’agent exécutif — j’entrepris au printemps de 1872 la rédaction du Mémoire de la Fédération jurassienne.

Avant de se séparer, le Congrès, conformément à l’article 3 des nouveaux statuts fédéraux, eut à désigner la localité dont la Section devrait nommer dans son sein le Comité fédéral jurassien. La localité choisie fut Sonvillier. Je ne me rappelle pas au complet les noms des cinq membres que les camarades de Sonvillier élurent pour former ce premier Comité, qui resta en fonctions jusqu’au Congrès du Locle ( 19 mai 1872). Le Bulletin de la Fédération jurassienne du 1er mai 1872 dit que les membres du Comité fédéral jurassien sont deux graveurs, deux guillocheurs et un monteur de boîtes. Le monteur de boîtes est certainement Alfred Andrié ; l’un des deux graveurs est Adhémar Schwitzguébel, qui fut secrétaire correspondant du Comité, et l’autre probablement Justin Guerber ; quant aux deux guillocheurs, je ne sais plus.


Nous n’eussions pas demandé mieux que de prolonger notre séjour au Val de Saint-Imier ; nos camarades venus de Genève, en particulier, enchantés de tout ce qu’ils avaient vu et entendu dans ce milieu d’égalité et de fraternité, au sein d’une population ouvrière simple, cordiale et sérieuse, éprouvaient un réel regret d’avoir à se séparer si tôt de leurs nouveaux amis. Mais on était déjà au lundi ; chacun devait reprendre le travail, et les délégués du Locle, de la Chaux-de-Fonds, de Moutier, de Neuchâtel, étaient rappelés chez eux par les nécessités de l’existence. Il fallut donc se résoudre à partir, après avoir pris un dernier repas en commun. Le temps, qui, la veille, était beau, était subitement devenu menaçant, et le ciel, assombri, annonçait l’approche d’une tempête de neige. Ceux des délégués qui avaient à regagner les Convers pour y prendre le train, soit dans la direction des Montagnes, soit dans celle du Vignoble,

  1. Cette délégation fut composée de N. Joukovsky, B. Malon et Jules Guesde.