Page:James Guillaume - L'Internationale, I et II.djvu/428

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de Bakounine à Ogaref, du 25 ; j’ignore quel motif fit ajourner ensuite l’exécution du plan jusqu’au mercredi 28. Voici la lettre de Bakounine dont je viens de parler :


25 septembre 1870. Lyon.

Mon vieil ami. Je l’enverrai immédiatement notre proclamation qui fait appel au peuple pour jeter bas tous les pouvoirs qui restent et qui gênent[1]. Cette nuit nous allons arrêter nos principaux ennemis ; demain la dernière bataille, et, nous l’espérons, le triomphe.

Envoie Henry [Sutherland] chez Lindegger. Probablement G[uillaume] a déjà fait parvenir la brochure. Sinon, qu’Henry prie Lindegger de vous l’apporter aussitôt qu’il l’aura reçue. Et dès que tu l’auras reçue, que notre ami, le vaillant colonel[2], l’apporte immédiatement, sans perdre une minute, à Lyon. Directement chez Palix, Cours Vitton, 41, entrée par la rue Masséna, 20, au premier. La brochure est indispensable, nous l’attendons tous.

Ton M. B.[3].


Le lundi 26, nouvelle réunion publique à la Rotonde ; Saignes préside ; Beauvoir donne lecture de l’affiche, qui est applaudie par la foule et dont la rédaction est adoptée à l’unanimité. Le président annonce qu’elle sera placardée sur tous les murs de la ville, et ajoute : « C’est notre tête que nous jouons en signant cette affiche, si nous ne réussissons pas ; mais le moment est venu ! Vaincre ou mourir[4] ! »

Voici le texte de ce document :


République française.
Fédération révolutionnaire des communes.

La situation désastreuse dans laquelle se trouve le pays ; l’impuissance des pouvoirs officiels et l’indifférence des classes privilégiées ont mis la nation française sur le bord de l’abîme.

Si le peuple organisé révolutionnairement ne se hâte d’agir, son avenir est perdu, la Révolution est perdue, tout est perdu. S’inspirant de l’immensité du danger, et considérant que l’action désespérée du peuple ne saurait être retardée d’un seul instant, les délégués des Comités fédérés du Salut de la France, réunis au Comité central, proposent d’adopter immédiatement les résolutions suivantes :

Article premier. — La machine administrative et gouvernementale de l’État, étant devenue impuissante, est abolie.

Le peuple de France rentre en pleine possession de lui-même.

Art. 2. — Tous les tribunaux criminels et civils sont suspendus et remplacés par la justice du peuple.

Art. 3. — Le paiement de l’impôt et des hypothèques est suspendu. L’impôt est remplacé par les contributions des communes fédérées, prélevées sur les classes riches, proportionnellement aux besoins du salut de la France.

  1. Je reçus également à Neuchâtel des exemplaires de l’affiche, le mardi ou le mercredi.
  2. J’ignore quelle est la personnalité que Bakounine désigne par ce sobriquet de « vaillant colonel ».
  3. Correspondance.
  4. Testut, L’ Internationale et le Jacobinisme au ban de l’Europe, 1872, t. II. pages 39-41.