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Théoriquement ces Messieurs ne peuvent s’armer que pour faire disparaître toute forme de gouvernement, et, si je suis bien informé, l’appel de Neuchâtel n’a pas d’autre but que de couvrir une ruse de guerre. Les communistes, dirigés en Suisse par Guillaume et consorts, en Russie par Bakounine, et par des comités occultes en France, cherchent à profiter de la détresse de la nation française et de la confiance de la jeune République, pour former des phalanges assez puissantes pour renverser le gouvernement de la République et l’empêcher de se constituer, et dans la débâcle générale proclamer l’anarchie, la destruction de la propriété individuelle, de la religion et de la famille. Je trouve le projet formidable, mais je suis sûr qu’il n’aboutira pas. Malgré cela je ne sais si les mesures que le gouvernement de Neuchâtel vient de prendre contre le manifeste Guillaume sont justifiées… Je me demande si le Conseil d’État n’a pas fait du zèle intempestif dans un but que j’apprécierai une autre fois.

P. C.


De son côté M. Outine publiait dans l’Égalité du 12 septembre un article intitulé Le manifeste d’un mystificateur ; le morceau ne vaut vraiment pas la peine d’être reproduit ici[1] ; j’en citerai seulement quelques phrases pour montrer quelle répugnante mauvaise foi avait présidé à la rédaction de ce factum. Il débute ainsi :


Nous venons de lire un manifeste adressé aux Sections de l’Internationale, issu on ne sait d’où au juste ; ne portant aucune signature, mais ayant pourtant, d’après l’en-tête qu’il porte, l’air d’être un supplément au n° 22 de la Solidarité… Malgré tout ce que nous pouvions attendre des élucubrations rhétoriques de la Solidarité, — sur le compte de laquelle nous nous sommes donné la parole de ne jamais revenir, — nous sommes persuadés que ce manifeste enfantin ne peut pourtant même être attribué à la rédaction de la Solidarité, et nous nous décidons à y voir une mystification d’un blagueur quelconque, ou, bien plus, d’un ignorant achevé.


Et plus loin :


Il est facile d’usurper une autorité que nous n’accordons à personne, et, en cherchant à compromettre notre chère association, de faire preuve d’une ignorance complète de ses principes. Nous verrons s’il est aussi facile de faire face à la juste indignation que ce manifeste, sans nul doute, provoquera dans toutes les Sections de l’Internationale. Considérant ce manifeste comme un enfantillage d’un ou de quelques vieux ou jeunes écoliers, nous nous abstiendrons d’une longue critique, en émettant simplement quelques considérations.


Le manifeste avait dit que « le roi de Prusse en veut à l’indépendance du peuple français » ; M. Outine traduit la chose en ces termes : « L’auteur du manifeste parle de l’indépendance, c’est-à-dire de l’intégralité[2] territoriale de la France ». Outine feint ensuite de croire qu’en disant que « le peuple français était redevenu maître de ses destinées », le manifeste entendait « faire adhésion à un gouvernement composé d’hommes connus

  1. Il a été réimprimé in-extenso dans le Mémoire de la Fédération jurassienne, p. 178.
  2. Sic.