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quement dévoué des idées politiques et sociales de M. Amand Gœgg.

M. Maurice Hess parle beaucoup de mon activité au Congrès de Bâle. Malheureusement je n'ai rien à raconter de la sienne, sinon qu'il a fidèlement applaudi les discours de M. Gœgg et qu'il a toujours voté avec lui.

Mais pour m'en veut-il ? Ah ! c'est que j'ai eu le malheur de le blesser deux fois dans son amour-propre : en lui disant d'abord franchement ce que je pensais de sa fameuse brochure, et en qualifiant, une autre fois, comme elle l'avait mérite, sa conduite malhonnête dans un incident qui s'était élevé entre quelques délégués parisiens et moi[1].


J'avais, de mon côté, écrit en réponse à l'attaque de Moritz Hess un article qui parut dans le Progrès du 16 octobre (n° 21). Le voici :


Échos du Congrès de Bâle.

Le Réveil, journal radical de Paris, publie dans son numéro du 2 octobre un article signé Maurice Hess, et qui prétend faire connaître au public l'histoire secrète du Congrès de Bâle.

Voici, d'après M. Maurice Hess, en quoi consiste cette histoire secrète.

Il y avait à Bâle, dit-il, un parti russe, dirigé par Bakounine, et proche parent du parti prussien dirigé par M. de Schweitzer. Ce parti russe travaille dans un intérêt panslaviste. Bakounine s'était flatté de pouvoir entraîner le Congrès de Bâle à modifier les principes et la direction de l'Internationale ; mais ces intrigues furent déjouées dans l'assemblée annuelle des délégués.

Certes, voilà du nouveau. Que pensent les délégués de la Suisse romande des menées panslavistes que leur attribue M. Maurice Hess ?

Ce n'est pas tout. M. Hess ajoute, à cette première absurdité, d'autres absurdités, qu'il entremêle d'insinuations odieusement perfides :

« Un parti russe n'existait pas encore aux précédents Congrès de l'Internationale. Ce n'est que dans le courant de l'année dernière qu'un essai tendant à changer l'organisation et les principes de l'Internationale, de même qu'à transférer le siège du Conseil général de Londres à Genève, a été fait par Bakounine, patriote russe dont nous ne soupçonnons pas la bonne foi révolutionnaire, mais qui caresse des projets fantaisistes non moins à réprouver que les moyens d'action qu'il emploie pour les réaliser.

«… On conçoit qu'un patriote russe, quand même il n'aurait aucune arrière-pensée inavouable, telle qu'on la suppose chez le chef des communistes prussiens[2], ait des préférences pour des procédés sommaires, aboutissant fatalement à une guerre sociale qui permettrait aux barbares du Nord de rajeunir la civilisation moderne[3]. »

  1. Je ne me souviens pas de l'incident auquel Bakounine fait allusion.
  2. Schweitzer.
  3. Marx avait écrit de Herzen que « ce demi-Russe, qui n'est pas Moscovite à demi, a prédit sérieusement le rajeunissement de l'Europe par le knout et une infusion obligatoire de sang kalmouk. » (Das Kapital, erster Band, 1867, page 763). Il a supprimé cette phrase dans la traduction russe (par Lopatine), ainsi que dans les éditions suivantes, pour ne pas s'aliéner les sympathies des socialistes russes, qui furent ses premiers lecteurs.