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Toutes les questions du programme du Congrès de Gand ayant été examinées, la discussion sur les grèves est reprise, et se prolonge assez tard, mais sans aboutir au vote d’une résolution.

Il est décidé, pour terminer la séance, que les procès-verbaux qui n’ont pas pu être lus seront remis au bureau, qui les vérifiera. Puis la clôturer du Congrès est prononcée aux cris de Vive l’Internationale !

Le lendemain, dimanche, les délégués de l’Internationale prenaient congé de leurs amis de Verviers pour se rendre à Gand, après avoir promis que ceux d’entre eux qui le pourraient s’arrêteraient à Verviers au retour.

J’ai à parler maintenant du Congrès de Gand ; je le ferai en empruntant au Bulletin la relation, rédigée par moi, qui se trouve dans son numéro du 23 septembre 1877.


Le Congrès de Gand.

Lorsque les délégués de l’Internationale arrivèrent à Gand le dimanche 9 septembre, vers deux heures de l’après-midi, le grand cortège par lequel devait être inauguré le Congrès avait déjà eu lieu ; ce fut donc seulement de la bouche des socialistes gantois qu’ils en apprirent les détails[1]. Vers les neuf heures du matin, les corporations ouvrières de Gand s’étaient rassemblées ; précédées du drapeau rouge, et aux sons de la Marseillaise, elles s’étaient d’abord rendues sur la place où s’élève la statue de Jacques Artevelde, le célèbre brasseur de Gand, qui, après avoir pendant plusieurs années défendu les droits de cette commune contre le comte de Flandre, périt assassiné en 1345. Une couronne avait été déposée aux pieds de la statue ; puis le cortège s’était dirigé vers la gare, où il avait reçu les délégués arrivant de Bruxelles et d’Anvers[2].

Nous employâmes l’après-midi à nous chercher des logements ; et le soir nous nous rendîmes au concert qui avait été organisé en l’honneur des délégués au local du Congrès, au Parnasse. Ce local se composait d’une salle de théâtre à deux rangées de galeries, pouvant contenir environ un millier de personnes ; d’une salle étroite, longue et basse, destinée aux séances du Congrès, ne pouvant recevoir que cent personnes au plus ; et de deux ou trois petites pièces, propres aux travaux des commissions.

Du concert, il est douteux qu’aucun membre de l’Internationale ait gardé une impression quelconque, autre que celle d’un théâtre rempli d’une foule compacte écoutant des amateurs chanter et jouer des airs d’opéra ; car les idées étaient ailleurs : ce qui nous intéressait, c’était de savoir le nombre et la provenance des délégués déjà arrivés. Mais il nous fut impossible d’obtenir des détails un peu précis, et force fut d’attendre au lendemain pour savoir ce que serait le Congrès.

Le lundi matin, lorsque les délégués de l’Internationale se rendirent à la salle des séances, leur première impression, il faut le dire franchement, fut celle d’une déception. La foule de la veille avait disparu, et ils se trouvaient dans une salle étroite, mal disposée, où une cinquantaine de personnes seulement étaient réunies. Les délégués présents furent invités à remettre leurs mandats à une commission de vérification, qui se composa d’un membre pour

  1. Nous trouvâmes au local du Congrès, à notre arrivée, quelques ouvriers socialistes de Gand (pas des chefs), et d’autres camarades venus des villes voisines, qui nous firent un accueil très cordial, et nous aidèrent à nous débrouiller dans une ville dont la langue nous était inconnue.
  2. Les socialistes de la partie flamande de la Belgique, Anvers, Malines, Gand, Bruxelles (qui se trouve à la limite du pays flamand), etc., s’étaient abstenus, de propos délibéré, de se faire représenter au Congrès de Verviers ; ils avaient réservé exclusivement leurs délégations pour le Congrès universel des socialistes. C’était dire de façon bien explicite : « Nous ne voulons plus de l’Internationale, et nous allons à Gand dans l’espoir d’y rencontrer d’autres éléments avec lesquels nons nous associerons en dehors de l’Internationale, et, s’il le faut, contre elle ».