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2.
Ci hanno tanto martoriato,
Tanto fatto ci hanno soffrir,
Che morire di fame o di piombo,
Di piombo o di fame, è tutt’ un morir.
 
3.
La bandiera è gia spiegata,
Ne mai più la ripiegherem :
con essa olterrem la vittoria,
O intorno ad essa noi morirem.

4.
Non pianger, mio tesoro,
Se alla morte incontro si va :
Non moriamo per nuovi padroni,
Moriamo invece per l’umanità !


Le lundi soir, je l’ai dit, la plupart des délégués s’étaient rendus à Sonvillier, où nous passâmes la nuit.

Le mardi matin, retournant à Neuchâtel, je pris le chemin des Convers, en compagnie de Kropotkine, qui rentrait à la Chaux-de-Fonds avec quelques camarades, et de Robin, qui nous faisait la conduite. Arrivés aux Convers, en attendant l’heure de mon train, nous nous assîmes à la lisière de la forêt, sous les sapins ; la journée était magnifique, et rarement la nature jurassienne, qui a tant de charmes pour mon cœur, m’avait paru si belle ; j’enviais Kropotkine, qui allait gagner la Chaux-de-Fonds à pied, en traversant la montagne, et Robin, qui retournait à Sonvillier, tandis que moi je redescendais dans le pays du vignoble, que brûle en août une chaleur torride. Mais je ne pouvais prolonger mon séjour aux Montagnes : le devoir m’appelait, il fallait aller faire le journal. Je pris congé de mes amis, et montai dans le train, qui s’engouffra dans le noir tunnel des Loges. Elles étaient maintenant derrière moi, les belles journées du Congrès de Saint-Imier, — le dernier Congrès jurassien auquel j’aie eu le bonheur d’assister.


Dix jours après le Congrès de Saint-Imier, une partie des délégués se retrouvaient à Berne, en compagnie d’autres camarades, pour paraître à l’audience du tribunal correctionnel. Sur vingt-neuf prévenus, il n’y avait que six étrangers à la Suisse ; de ces six étrangers, cinq (Rinke, Brousse, Werner, Deiber, Voges) avaient été poursuivis parce que, habitant la ville de Berne, leur présence à la manifestation du 18 mars était de notoriété publique, de sorte qu’il n’avait pas été possible d’empêcher la police d’en être avertie ; le sixième, Albert Graber, graveur, Allemand, habitant Sonvillier s’était dénoncé lui-même. Quant à ceux des participants étrangers qui n’habitaient pas le canton de Berne, nous avions voulu qu’ils ne fussent pas poursuivis, et le secret fut bien gardé sur leur participation : la police ignora les noms de Kropotkine, de Pindy, de Ferré, de Jeallot. de Baudrand, de Gevin, de Lenz, de Plekhanof, etc. On a vu plus haut que, pour la plupart de ceux de nos camarades suisses qui furent impliqués dans le procès, leurs noms ne furent connus du juge d’instruction que parce qu’ils avaient demandé eux-mêmes à être compris dans les poursuites.

L’audience du tribunal devant s’ouvrir à huit heures du matin, je me rendis à Berne dès la veille, le mercredi 15 août, et la plupart de mes co-accusés firent de même. Nous soupâmes ensemble dans un restaurant où nous nous étions donné rendez-vous ; et j’eus l’agréable surprise d’y rencontrer la jeune comtesse silésienne Gertrude von Schack, que je connaissais depuis quelques années et qui allait, deux mois après, devenir ma belle-sœur ; elle avait désiré assister au procès pour s’initier aux idées socialistes, dont elle se fit, quelques années plus tard, l’active propagandiste en Allemagne et en Angleterre. Il avait été entendu que nous nous défendrions nous-mêmes, sans avoir recours à l’é-