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de nouveau la question de l’abstention dans les élections politiques. Voici une partie de son article (28 janvier 1877) :


La tactique de l’abstention électorale.

... Si l’on veut examiner les choses sans parti pris, avec le désir sincère de les voir telles qu’elles sont, voici comment apparaît, à l’heure qu’il est, l’état de la question dans le débat entre les socialistes de langue allemande et nous, relativement à la politique électorale :

En Allemagne, la participation aux élections paraît être, pour le moment, un puissant moyen de propagande. Les socialistes allemands emploient donc cette arme, la plus efficace, disent-ils, dont ils puissent disposer aujourd’hui ; et loin de les blâmer, nous applaudissons à leurs succès ;

En Alsace, il a été reconnu par le Congrès de Gotha de 1876 que la question de savoir s’il fallait, oui ou non, prendre part au scrutin devait être laissée à l’appréciation des socialistes alsaciens eux-mêmes. Ceux-ci se sont décidés pour l’abstention. Nous les approuvons ; et les socialistes d’Allemagne les avaient approuvés d’avance ;

Aux États-Unis, les socialistes ne veulent pas se mêler des tripotages électoraux. Nous pensons qu’ils ont raison ; les socialistes d’Allemagne partagent notre manière de voir, et la Tagwacht elle-même se rallie à cette opinion.

Ainsi, dans ces trois cas, Allemands et Jurassiens sont d’accord sur la tactique à suivre. Ils disent les uns et les autres :

Aux États-Unis, il faut s’abstenir ;

En Alsace, c’est aux socialistes alsaciens à déterminer eux-mêmes leur ligne de conduite ;

En Allemagne, le vote est un puissant moyen de propagande.

Mais il est un point où l’accord cesse : c’est lorsqu’il est question de la Suisse.

Nous ne croyons pas, nous, à l’efficacité de la participation au vote, en Suisse, ni comme moyen de propagande, ni surtout comme moyen d’émancipation.

Les ouvriers de langue allemande, par contre, pensent presque tous qu’en Suisse le vote peut être utilement employé, comme simple moyen de propagande, disent les uns ; comme moyen à la fois de propagande et d’émancipation, disent les autres.

Qui a raison ?

Jusqu’à présent, il nous semble que l’expérience a prononcé en notre faveur. Mais, sans rentrer en ce moment dans le fond du débat, nous nous contentons de prier nos contradicteurs de prendre note de ce point :

Si l’on veut nous convaincre que nous avons tort, et que la tactique que nous recommandons pour la Suisse est mauvaise, il ne faut pas nous offrir l’Allemagne en exemple, et nous dire que, puisque les socialistes allemands vont voter, nous devons aller voter aussi ; car nous aurions un autre exemple à citer, et nous répondrions : « Les socialistes des États-Unis (et il y a beaucoup d’Allemands parmi eux) ne vont pas voter, et vous dites qu’ils ont raison ».

Pour argumenter contre nous, il faudrait nous prouver qu’en Suisse, et