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Après avoir débuté dans les rangs de la démocratie bourgeoise, il avait, comme Fanelli en Italie, compris l’impuissance de ce parti, et, déjà vieux, il s’était rattaché au socialisme. C’est lui qui a prononcé cette parole célèbre : « Quand la postérité écrira l’histoire du dix-neuvième siècle, la fondation de la moindre société ouvrière aura pour elle plus d’importance que la bataille de Sadowa ». Lors des élections de 1874, il avait refusé de se laisser de nouveau porter comme candidat ; élu malgré lui, il donna sa démission. Parti de la démocratie bourgeoise pour arriver au socialisme, il avait fini par dépasser le socialisme parlementaire, qui domine encore aujourd’hui en Allemagne, et par se déclarer comme nous, bien qu’avec certaines différences de programme, socialiste révolutionnaire.


En Danemark, le socialiste Brix, qui avait été condamné à six mois de prison pour un article paru dans le journal le Ravnen, fut frappé en janvier d’une nouvelle condamnation, à quatre ans de détention cette fois, pour crime de lèse-majesté.

Une grande assemblée populaire eut lieu le 5 février à Copenhague pour aviser aux moyens de remédier au chômage dont souffrait la classe ouvrière. Une résolution présentée par Louis Pio fut adoptée à l’unanimité ; elle disait que, « l’organisation sociale existante empêchant les ouvriers de s’occuper eux-mêmes de corriger les abus sociaux, c’était au gouvernement et à la Chambre à indiquer les moyens de faire cesser le malaise qui pèse sur les producteurs » ; et elle demandait en outre que « l’État accordât une somme de 200,000 couronnes, destinée à aider les ouvriers sans travail qui voudraient émigrer en Amérique pour y fonder une colonie ». Une députation fut nommée pour présenter immédiatement cette résolution au président du Conseil des ministres et au président de la Chambre. Notre Bulletin, en relatant cette nouvelle, ajouta : « On nous permettra de penser et de dire que les travailleurs danois ne sont pas en ce moment sur la bonne voie ».


En Russie, le procès de ceux des manifestants de l’église Notre-Dame-de-Kazan qui avaient été arrêtés eut lieu en janvier 1877 : il y avait vingt et un accusés, dont quatre paysans et quatre jeunes filles ; la plupart des autres étaient des étudiants. Tous furent condamnés : trois d’entre eux, Bogolioubof, Bibergal et Tcherniavsky, à quinze ans, et deux autres, Botcharof et Guervasi, à dix ans de travaux forcés.

Le Vorwärts de Leipzig, après avoir rendu compte du procès, termina par cette réflexion :


Espérons que cette affaire servira à la jeunesse révolutionnaire de Russie d’exemple propre à l’effrayer (Hoffentlich lässt sich die revolutionäre Jugend in Russland diese Affaire zum abschreckenden Beispiel dienen).


Le Bulletin (25 février 1877) releva comme elle méritait de l’être cette attitude du Vorwärts :


Nous le demandons, est-ce là le langage d’un journal socialiste ? Quoi donc ! le Vorwärts espère que les actes barbares du gouvernement russe réussiront à intimider la jeunesse révolutionnaire, et que cette jeunesse ne fera plus de ces démonstrations « irréfléchies » qui déplaisent aux membres du Reichstag allemand ? Voilà donc où conduit le parlementarisme ? On en vient à ne plus comprendre, chez un peuple voisin, un mode d’action différent de celui qu’on pratique soi-même ; et, si on ne donne pas son ap-