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profiter de la réunion des délégués de l’Internationale pour avoir une explication fraternelle sur les points du programme sur lesquels ces deux fractions du grand parti socialiste universel n’étaient pas d’accord. À une invitation qui fut faite aux socialistes d’Allemagne d’assister à notre Congrès il fut répondu affirmativement, moyennant que la date de sa réunion fût renvoyée à la fin d’octobre.

Nous ne vous parlerons pas des événements qui ont surgi dans l’Internationale depuis le dernier Congrès. Les délégués des différents pays représentés ici devant nous faire un rapport sur ce qui s’est passé dans leurs fédérations respectives, nous nous bornerons à vous rappeler que le Congrès de 1870 fut supprimé d’un commun accord, sur la proposition de nos amis d’Espagne, à cause des persécutions dont les socialistes italiens et espagnols étaient alors l’objet tout particulier. Ajoutons que la situation en France était la même à peu près qu’aujourd’hui où ce pays ne peut encore se faire représenter qu’indirectement.

Nous n’avons donc à vous signaler que l’événement heureux dont nous vous parlions dans notre circulaire de convocation, le rapprochement avec nos frères d’Allemagne, après une séparation dont les ennemis du socialisme eussent été heureux de ne jamais voir la fin.

Nous espérons que de cette réconciliation tant désirée par tous les socialistes sincères va sortir une nouvelle phase d’agitation et d’action révolutionnaire, et que, tout en respectant mutuellement leurs convictions quant aux moyens à employer, ils marcheront tous vers le même but : l’abolition de l’exploitation du travail par le capital, l’avènement du prolétariat à la jouissance de tous ses droits.


Dans la même séance furent encore entendus les rapports des Fédérations italienne et espagnole.

Le rapport de la Fédération italienne fut présenté oralement par Malatesta. En voici le résumé, d’après le Compte-rendu :

« Malatesta annonce que le rapport italien, élaboré au Congrès de Florence, a été détruit par les compagnons qui en étaient porteurs, pour empêcher qu’il ne tombât entre les mains de la police : cependant la Fédération italienne a pris des mesures pour assurer l’impression de ce rapport, qui doit paraître dans peu de jours[1]. Puis il fait l’historique de l’activité des internalionalistes en Italie.

« C’est contre les soi-disant révolutionnaires mazziniens et garibaldiens que l’Internationale a eu la lutte la plus acharnée à soutenir.

« Au commencement de 1874, une très vive agitation se produisit sur différents points de l’Italie, par suite de la baisse des salaires et du renchérissement exorbitant des objets de consommation. Dans un grand nombre de localités les magasins furent pris d’assaut et mis au pillage. L’Internationale se trouvait par là dans la nécessité de repousser entièrement ces actes populaires ou de s’en déclarer solidaire ; c’est ce dernier parti qui fut pris. Malatesta pense que l’Internationale ne pouvait agir autrement : d’abord parce qu’il estime que si l’Internationale avait repoussé ces actes accomplis par le peuple, elle aurait perdu tous les partisans pratiques de la révolution ; puis parce qu’il croit que la révolution consiste bien plus dans les faits que dans les mots, et que, chaque fois qu’éclate un mouvement spontané du peuple, chaque fois que les travailleurs se lèvent au nom de leurs droits et de leur dignité, il est du devoir de tout socialiste révolutionnaire de se déclarer solidaire du mouvement.

  1. Malgré cette promesse, le rapport n’a pas été publié.