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définissaient clairement les attributions du Conseil régional et des Congrès, et transféra le Conseil régional à Verviers, dont la fédération locale fit tout le possible pour être à la hauteur de la tâche qui lui était confiée, tant par le caractère donné au journal (le Mirabeau) que par des relations suivies avec les fédérations. Demoulin donne quelques détails sur chacune des fédérations qui constituent la Fédération belge.

« La vallée de la Vesdre, dit-il, a eu à subir une grève assez importante de tisserands, qui a donné lieu à quelque découragement, les ouvriers n’ayant pas obtenu gain de cause. Un point pourtant qu’il est bon de signaler, ce sont les manifestations qui se sont faites comme protestations contre les quelques lâches qui avaient, dans cette grève, trahi la cause du travail.

« La fédération liégeoise et celle du bassin de Charleroi sont restées à peu près stationnaires. La fédération boraine[1] est occupée à se reformer plus forte que jamais, et donne à espérer pour l’avenir. La fédération du Centre a subi une crise à la suite d’une grève malheureuse et de l’emprisonnement de quelques-uns de ses membres.

« Bruxelles marche bien, et promet par ses nombreux corps de métier constitués.

« Anvers aussi a commencé une propagande active dans les villages des Flandres, et les effets de cette propagande se font sentir par la fondation de nouvelles sections.

« À Gand, une forte section est formée, et elle marche très bien.

« L’Internationale est en Belgique une puissance avec laquelle on doit désormais compter, en dépit de ce que peuvent en penser et dire nos ennemis.

« Schwitzguébel rend compte de la situation en Suisse. La grande industrie est encore peu développée dans ce pays, et l’antagonisme complet entre la bourgeoisie et le prolétariat n’est pas encore devenu un fait général ; il en résulte que la majorité du peuple, occupant une position intermédiaire entre la bourgeoisie et le prolétariat, s’inspire plutôt des mœurs, des tendances des classes moyennes, et n’a, par conséquent, pas encore pris conscience de la grande lutte moderne qui a éclaté entre le travail et le capital. Cette situation rend très difficile la propagande socialiste et l’organisation spéciale des travailleurs. Les traditions politiques du peuple suisse sont également un obstacle. Parce que la constitution politique suisse revêt une forme républicaine, le peuple croit avoir réalisé tout ce qui est désirable. Cependant, malgré les réformes sans cesse renouvelées dans les constitutions et les lois, la position économique du peuple, loin de s’améliorer, tend à empirer. Tandis que les Républiques française et espagnole se montrent beaucoup plus réactionnaires que n’importe quel gouvernement monarchique, la réaction en Suisse n’est pas accentuée, mais le résultat, au point de vue des intérêts du mouvement socialiste, est le même, par le fait des dispositions réactionnaires de réunion publique. Les sections organisées, malgré ces difficultés, n’en continueront pas moins à faire leur devoir, et elles seront prêtes à faire leur part dans la révolution sociale universelle[2].

« Eccarius, délégué anglais, rend compte de la situation en Angleterre. L’Internationale, depuis les dernières luttes intestines, n’a pu se développer

  1. Le Borinage est le pays de Mons, Jemappes, Quaregnon, Frameries, Pâturages, etc.
  2. Le rapport envoyé par le Comité fédéral jurassien au Congrès de Bruxelles contient le passage suivant : « Notre Fédération se compose actuellement de onze sections, disséminées dans les localités populeuses du Jura bernois et neuchâtelois, à l’exception d’une qui se trouve en Alsace. Deux seulement sont des sociétés de métier, toutes les autres sont des sections mixtes, constituées en cercles d’études sociales ou sections de propagande socialiste. Nous avons eu le regret de voir la Section de propagande socialiste de Genève se séparer de nous à la suite d’une correspondance dans laquelle une certaine divergence d’opinion s’était manifestée entre elle et le Comité fédéral au sujet de l’application du principe d’autonomie ; elle n’en continuera pas moins, nous l’espérons, à travailler dans sa sphère d’action, à la propagation des idées socialistes. »