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bien entendu que nous nous réservons d’aller plus loin pour notre propre compte lorsque nous le trouverons opportun.

« 2° Nous basant sur les déclarations formelles de nos mandats, nous déclarons être prêts à nous rallier aux autres sociétés ouvrières de la Suisse, pour la formation de fédérations ouvrières locales et de fédérations corporatives régionales ; mais nous ne pouvons accepter l’idée d’une Association ouvrière suisse dirigée par un Comité central.

« Nous garderons notre organisation fédérative actuelle, tout en assurant les sociétés ouvrières de la Suisse de notre concours le plus dévoué dans la lutte contre la bourgeoisie et de notre entière solidarité morale et matérielle sur le terrain économique.

« Olten, le 2 juin 1873.

« Louis Pindy et James Guillaume, délégués collectivement par la Fédération jurassienne de l’Internationale, et en outre par les graveurs, guillocheurs et faiseurs de secrets du Locle ; Henri Wenker, délégué par la Section internationale de Neuchâtel, le Deutscher Arbeiterbildungsverein de Neuchâtel[1], les cordonniers, menuisiers, et tailleurs de pierre de Neuchâtel ; Léon Schwitzguébel, délégué par les Sections internationales de Sonvillier et de Saint-Imier, les graveurs, les guillocheurs, les repasseurs et remonteurs, les faiseurs de secrets, les peintres et émailleurs du Val de Saint-Imier ; Gameter, délégué des monteurs de boîtes de Bienne. »


Le Congrès, continuant ensuite ses délibérations, décida la création, sous le nom de Schweizerischer Arbeiterbund (Union ouvrière suisse), d’une organisation comprenant à la fois des Sections du Grütli, des Sections de l’Internationale, et des sociétés corporatives. La Tagwacht de Zurich, que rédigeait Greulich, fut déclarée l’organe officiel de la nouvelle Association, et le Comité central, composé en majorité de membres parlant allemand, fut placé pour la première année à Genève.


Il se passa à Zürich, au cours de l’année 1873, au sein de la colonie russe de cette ville, des incidents qui devaient avoir une fâcheuse répercussion sur la propagande du socialisme parmi les Russes. Ce n’est pas dans un livre comme celui-ci que le détail de ces choses peut être raconté ; et je dois me borner à de brèves indications[2].

Au commencement de 1873 éclata, parmi les Russes de Zürich, une querelle au sujet d’une bibliothèque qui avait été fondée, environ un an auparavant, par le groupe des jeunes amis de Bakounine. Le groupe des fondateurs se considérait comme propriétaire de la bibliothèque ; les simples lecteurs n’avaient pas le droit de participer à son administration : ils étaient seulement admis à emprunter des livres, moyennant le paiement d’une cotisation mensuelle. Il arriva que les lecteurs demandèrent à être considérés tous comme ayant les mêmes droits que les membres du groupe fondateur ; ceux-ci refusèrent, ne voulant consentir à admettre comme membres de leur groupe que ceux des lecteurs qui leur paraîtraient offrir des garanties suffisantes au point de vue socialiste. Deux membres du groupe fondateur, Smirnof et Idelson, prirent le

  1. Le Deutscher Arbeiterbildungsverein de Neuchâtel, bien que composé d’ouvriers allemands, avait subi l’influence du milieu, et avait donné mandat à son délégué de repousser la centralisation.
  2. J’ai communiqué à mon amie Véra Figner, le 3 juin 1908, les pages qui suivent sur les querelles de Zürich, auxquelles elle s’est trouvée mêlée, et j’ai rectifié d’après ses indications quelques points du récit qu’on va lire. Ces pages ont également été lues par mon ami Michel Sajine, à qui je dois plusieurs renseignements.