au vôtre ? » Ah ! Charlemagne regrettait bien d’être sorti de sa chanson de geste ! Il s’y serait refourré volontiers s’il l’avait eue sous la main !
— Comment pouvez-vous rire de… tout cela ? dit Virginie. Ainsi nous ne… pourrons pas… nous marier ?
Elle chuchota ce dernier mot plutôt qu’elle ne le prononça. Legoff se remit à rire.
— Mais, ma chère amie, je viens justement de vous dire le contraire. Nous marier ! Comment donc ! Nous ne faisons que cela ! Seulement, il y aura du tirage. Je connais Charlemagne. Il est obstiné. Il ne donnera jamais son consentement. Il faudra faire une sommation. Il aura un coup de sang, ce jour-là, avec ses idées sur le respect. Il serait capable de ne pas venir à la noce… Hum ! Je ne sais trop comment ça tournera… Bah ! Nous ne l’inviterons pas au mariage, et, quant aux avanies, nous nous arrangerons pour ne pas en recevoir…
Virginie réfléchissait.
— Renoncez à moi, s’écria-t-elle, tout à coup.
Andréa et Sylvestre se regardèrent avec stupéfaction. Devenait-elle folle ? Tendait-elle un piège à son ami ? Mais, sans doute, n’était-ce qu’un enfantillage.
Elle continuait :
— Oui, renoncez à moi, vous avez tort de vous entêter… Je vais faire votre malheur… et sans moi…
— Oh ! ma chère, comme vous êtes tragique, vous aussi ! Et mes ancêtres, qui vous refusent ! Vous feriez de si fameux scénarios à vous trois !… Mais ce n’est pas ça du tout ! Et d’ailleurs, chère chérie, ajouta-t-il, calmement, je ne pourrais jamais renoncer à vous, quand bien même je le voudrais. Que vous êtes cruelle de me parler ainsi ! N’avez-vous pas encore compris que je vous aime avec démence et que je préférerais, ma foi, être toute ma vie malheureux avec vous qu’heureux avec cette Marguerite Sorémy, qui ressemble à une oie engraissée pour la Noël !
Il disait cela, en souriant, avec sa voix gouailleuse et drôle ; on ignorait s’il était sincère ou se moquait, tant il dissimulait, sous un voile d’ironie, la sensibilité exces-