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LE RESTE EST SILENCE…

modés, étourdis et falots, comme des revenants qu’ils étaient et qui ne comprendraient plus rien à ce temps…

Tout-à-coup, ma mère s’arrêta, et, se levant brusquement, se jeta sur le canapé, comme si elle se sentait subitement accablée de douleur. Là, je la vis qui éclatait en sanglots, comme une enfant. Elle sortit un mouchoir et tamponna fiévreusement ses yeux, — un petit mouchoir de batiste à dentelles, si fin, si mince qu’il était à peine bon pour orner une poche, mais non point pour essuyer des larmes.

Affolé, désorienté, je m’élançai vers les bras de la pauvre femme, je m’écriai :

— Ne pleure plus, maman, je t’en prie, ne pleure plus… Qu’est-ce que tu as ? On t’a fait du mal ?

— Non, mon chéri, non, je suis agacée, voilà tout… Attends un peu, cela va passer…

Mais cela ne passait pas du tout. Maman ne pouvait plus s’arrêter de pleurer.

— On t’a fait quelque chose, dis, maman ?

— Non, mon chéri…