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comique, lord Herbert se fit remarquer par ses folies et sa hardiesse. Il allait de la cour aux bouges les plus sordides, de la compagnie du roi à celle des matelots qui s’enivrent dans les tavernes. Il quittait une duchesse pour une danseuse ou une actrice de petit théâtre.

Insolent, railleur, cassant et bretteur, et, avec cela, d’un orgueil qui fut jugé excessif dans la société la plus orgueilleuse de l’univers, il vit le monde et fréquenta tous les mondes, sans quitter cet air d’immense ennui toujours peint sur sa figure si belle et si froide qu’aucune expression n’y passait jamais. Il traversa les émotions humaines, il les essaya toutes, comme un changeur pèse dans sa balance les pièces d’or qu’on lui soumet. Il se mêla aux autres hommes et fit semblant d’être pareil à eux. Il fut lâche, menteur, méprisant, fourbe, amoureux, jaloux, cruel, infidèle, avide, perfide et brutal, comme ils le sont tous, et peut-être même sut-il l’être mieux que la plupart, parce qu’il était plus intelligent. Mais, à ces sentiments où les autres se