Page:Jaloux - Le reste est silence, 1910.djvu/128

Cette page a été validée par deux contributeurs.
118
LE RESTE EST SILENCE…

VIII


Non, dans le premier moment, je ne sais trop ce que nous nous dîmes, ma mère et moi. Il a passé bien des années depuis, et chacune, en s’en allant, emporte quelques souvenirs. Cela était encore il y a peu de temps si précis, si vivant, si net ! Mais il est venu dans tout cela une sorte de fumée corrosive ; elle a embué des figures, voilé des attitudes, effacé de grands morceaux de mémoire ; elle envahit toujours, gagne du terrain, s’étend… Bientôt il ne restera plus que des cadavres de souvenirs, de misérables choses incohérentes, un geste, la lumière d’un certain soir, un sourire, une parole, un regard mouillé, — avant