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blié sa pharmacie… C’est de là-dedans qu’il a tiré sa drogue stupide… (Il s’avance, et prend différentes fioles, l’une après l’autre. Almanzor est toujours très-occupé à examiner la boite qu’il tient en main. Lisant les étiquettes des fioles.) Recette contre l’embonpoint… (Il l’empoche.) Baume oriental, qui procure des songes dorés… Ça me va… (Il l’empoche.) Eau pour teindre les cheveux… (Il l’empoche. Almanzor a ramassé la boîte dans la cassette. Il s’avise de l’ouvrir, et éternue aussitôt.) Qu’est-ce que c’est que ça ?… Il prend la boite des mains d’Almanzor, et lit.) Poudre à l’usage des farceurs qui veulent s’amuser en société : sternutatoire… (Almanzor éternue plus fort.) Oh ! quelle idée !… Silence, muet, silence… Voici Sifroid !… Va-t’-en. (Il pousse Almanzor qui sort à droite. Il met la boite dans sa poche.)


Scène V.

GOLO, Les Savants, Courtisans.
CHŒUR GÉNÉRAL.
––––––––Bénissons à jamais
––––––––La chimie et ses secrets !
–––––––––––Tout le monde
–––––––––––À la ronde
––––––––En éprouve les bienfaits !
––––––––Bénissons à jamais
––––––––La chimie et ses secrets !
GOLO, aux deux premiers Savants.
––––––Ce spécifique, est-ce possible ?
––––––Rendrait à l’esprit son ardeur ?
PREMIER SAVANT.
––––––Voulez-vous savoir s’il est sûr, infaillible ?
DEUXIÈME SAVANT.
––––––Regardez venir monseigneur.

Scène VII.

Les Mêmes, SIFROID. Il arrive plein de feu, l’humeur gaillarde, avec des frissons nerveux.
SIFROID.
COUPLETS.
I
–––––––Une poule, sur un mur,
–––––––Qui picotait du pain dur,
–––––––Appelait, en cocottant,
–––––––Son coq absent pour l’instant.
–––––––On était au mois de mai,
–––––––Et déjà l’air enflammé
–––––––Émoustillait jusqu’aux os
–––––––Les chats, les chiens, les oiseaux.
––––––––––Cocorico !
–––––––Que ce chant de basse-cour
––––––––––Cocorico !
––––––––––Renferme d’amour !
–––––––Est-ce une nouvelle vie
–––––––Ou l’effet du printemps
–––––––Qui me gratte… gratifie
–––––––D’une ardeur comme à vingt ans ?
––––––––––Cocorico !
–––––––Je voudrais bien, par un troc,
–––––––De la poule être le coq.
II
–––––––La poulette, que l’amour
–––––––Tracassait depuis un jour,
–––––––Frétillait d’un air coquet,
–––––––Gentille et tendre à croquer :
–––––––Aussi son coquin de coq,
–––––––Perché non loin sur un soc,
–––––––La voyant si frétiller,
–––––––Rentra vite au poulailler.
––––––––––Cocorico !
–––––––Que ce chant de basse-cour
–––––––Renferme d’amour !
–––––––Est-ce une nouvelle vie
–––––––Ou l’effet du printemps
–––––––Qui me gratte… gratifie
–––––––D’une ardeur comme à vingt ans ?
––––––––––Cocorico !
–––––––Je voudrais bien pour un troc
––––––––––Cocorico !
–––––––De la poule être le coq.

(Les Pages donnent un fauteuil à Sifroid. Ensuite on lui passe sa perruque, son habit, de la poudre, du rouge.)

–––––––Holà ! mes gens (bis), voici ma tête,
–––––––Que l’on me coiffe avec talent !
–––––––Qu’on me parfume et me revête
–––––––De mon habit le plus galant !
–––––––Qu’on me donne un miroir
––––––––––Je veux me voir.
CHŒUR.
––––––––––Vite un miroir !
––––––––––Il veut se voir.

(Un page apporte un miroir.)

SIFROID.
––––Pas mal, un peu plus de rouge à la peau (Bis).
––––––––Très-bien ! me voilà beau.
CHŒUR.
––––––Ah ! qu’il est bien ! ah ! qu’il est beau !
SIFROID.
–––––––Est-ce une nouvelle vie
–––––––Ou l’effet du printemps
–––––––Qui me gratte… gratifie
–––––––D’une ardeur comme à vingt ans ?
ENSEMBLE.
SIFROID, CHŒURS.
–––––––Aujourd’hui, jour de folies,
–––––––Prenons nos joyeux ébats
–––––––On prend ses
–––––––Auprès de femmes jolies
–––––––Que l’amour guide nos pas.
GOLO.
–––––––Auprès de femmes jolies
–––––––Si l’amour guide nos pas,
–––––––Il payera cher ses folies.
–––––––Allons, ne le quittons pas.

(Deux hommes emportent Sifroid sur leurs bras. Tout le monde le suit. — Changement à vue.)