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l’index, leur faisait sortir l’eau du ventre. Beaucoup de magiciens et de sorciers ont su produire également des cures merveilleuses par le simple attouchement. Voy. Chaumes, Écrouelles, etc.

Aubigné (Nathan d’), en latin Albineus, fils du fameux huguenot d’Aubigné. Il était partisan de l’alchimie. Il a publié, sous le titre de Bibliothèque chimique, un recueil de divers traités, recherché par ceux qui croient à la pierre philosophale[1].

Aubrey (Jean), Alberius, savant antiquaire anglais, mort en 1700, Il a donné, en 1696, un livre intitulé Mélanges sur les sujets suivants : Fatalité de jours, fatalité de lieux, présages, songes, apparitions, merveilles et prodiges ; réimprimé en 1721, avec des additions.

Aubry (Nicole), jeune fille de Vervins, dont la possession a fait, très-grand bruit au treizième siècle. À l’âge de seize ans, étant allée prier sur la tombe de son père, l’esprit de cet homme lui apparut, sortant du tombeau, et lui prescrivit combien elle devait faire dire de messes pour le repos de son âme. Elle exécuta ponctuellement tout ce qui lui était recommandé ; mais, malgré son exacte, obéissance, elle n’en continua pas moins à être tous les jour visitée par cet esprit, qui finit-par lui-avouer qu’il était un démon. Ce démon la transporta en divers lieux et l’enleva même devant de nombreux témoins, ce qui fit reconnaître évidemment qu’elle en était possédée. L’évêque de Laon la fit exorciser, et ce fut pendant trois mois sans résultat. Dix hommes, et quelquefois plus, la tenaient durant les exorcismes, et elle leur était arrachée à la vue de la foule. Des notaires publics dressaient les procès-verbaux de ces faits, qui se sont répétés deux siècles plus tard sur la tombe du diacre Paris, et qui, dans l’une et l’autre affaire, ont été constatés dans toutes les formes et avec toutes les garanties désirables. La science humaine a barboté autour de ces monstrueux phénomènes sans pouvoir les expliquer. En même temps que cette puissance qui, dans une jeune fille, rendait vains les efforts de quinze ou seize hommes robustes, Nicole Aubry parlait plusieurs langues, découvrait les choses les plus secrètes et voyait ce qui se passait à quelques lieues d’elle.

Cette première période-des exorcismes avait eu lieu à Vervins ; l’évêque, étonné, fit venir la jeune fille à Laon, où il l’exorcisa lui-même dans la cathédrale remplie continuellement à ce sujet de dix à douze mille spectateurs. Ce n’était plus un seul démon qui s’était installé dans Nicole Aubry. C’était dès lors, sans aucun doute, par la permission de Dieu, toute une légion d’esprits mauvais ; et il y eut des scènes si étranges, que le Parlement de Paris et l’Université envoyèrent des commissaires à Laon ; le nonce du pape y vint aussi. Les démons, voyant ce concours, en devinrent plus insolents : ils insultaient les exorcistes et l’évêque lui-même ; mais ils ne ménageaient pas les protestants, qui demandèrent qu’on emprisonnât la possédée. Un médecin, de leur secte, ayant tenté de l’empoisonner, on ne les écouta points Les démons, malgré eux probablement, turlupinaient la réforme pur des sarcasmes si incisifs, qu’ils eurent pour résultat la conversion d’un grand nombre de calvinistes, parmi lesquels nous citerons Florimond de Rémond, qui a laissé un nom dans les sciences historiques. Les démons enfin furent vaincus et la jeune fille délivrée. On a dit qu’ils étaient au nombre de vingt-neuf, en tête desquels étaient Belzébut, qui était venu à elle sous la figure d’un taureau, Baltazo sous celle d’un mouton, Astaroth sous celle d’un porc, les autres sous forme de chats gros comme des brebis. — L’histoire de Nicole Aubry fut publiée par la Sorbonne, en français, en latin, en espagnol, en italien et en allemand. Elle avait tant de retentissement que Charles IX en voulut voir l’héroïne, qui lui fut présentée le 27 août 1506.

Cette histoire a été tellement dénaturée par les protestants, qui ont falsifie aussi de Loudun et quelques autres, qu’il est très-rare chez nous de la trouver exacte. Gorres l’a donnée, consciencieusement dans le tome IV de sa Mustique.

Audumla. Une étincelle de la lumière divine ayant fondu une portion des glaces de la Scandinavie, il naquit de cette goutte, la génisse Audumla, qui nourrit de son lait Imir né avec elle. Puis elle lécha des glaçons d’où sortit Bor ou Buri. (Mythologie Scandinave.)

Augerot d’Armore, sorcier. Voy. Chorropique.

Augures. Les augures étaient, chez les Romains, les interprètes des dieux. On les consultait avant toutes les grandes entreprises : ils jugeaient du succès par le vol, le chant et la façon de manger des oiseaux. On ne pouvait élire un magistrat, ni donner une bataille, sans avoir consulté l’appétit, des poulets sacrés ou les entrailles des victimes. Annibal pressant le roi Prusias de livrer bataille aux Romains, celui-ci s’en excusa en disant que les victimes s’y opposaient. — « C’est-à-dire, reprit Annibal, que vous préférez l’avis d’un mouton à celui d’un vieux général. »

Les augures prédisaient aussi l’avenir par le moyen du tonnerre et des éclairs, par les éclipses et par les présages qu’on tirait de l’apparition des comètes. Les savants n’étaient pas dupes de leurs cérémonies, et Cicéron disait qu’il ne concevait pas que deux augures pussent se regarder sans rire.

Quelques-uns méprisèrent, il est vrai, la science des augures ; mais ils s’en trouvèrent mal, parce que le peuple la respectait. On vint dire à Clau-

  1. Bibliotheca chimica contracta ex delectu et amendatione Nathanis Albinei, in-8o. Genève, 1654 et 1673.