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qu’on donne aux cartes égyptiennes, italiennes et allemandes ; le jeu se compose de soixante-dix-huit cartes, avec lesquelles on dit la bonne aventure d’une manière plus étendue que par nos cartes ordinaires. Il y a dans ce jeu vingt-deux tarots proprement dits. Dans les cartes italiennes, les tarots sont les quatre éléments (vieux style), l’Évangile, la mort, le jugement dernier, la prison, le feu, Judas Iscariote, etc. ; dans les cartes allemandes, les tarots sont le fou, le magicien, l’ours, le loup, le renard, la licorne, etc. Il y a ensuite cinquante-six cartes, savoir : quatre rois, quatre dames, quatre cavaliers, quatre valets ; dix cartes depuis l’as jusqu’au dix pour les bâtons (ou trèfles) ; dix pour les épées (ou piques) ; dix pour les coupes (ou carreaux) ; dix pour les pièces d’argent (ou cœurs).

Il serait trop long de détailler ici l’explication de toutes ces cartes. Elle ressemble beaucoup à la cartomancie ordinaire. Cependant elle donne infiniment plus d’oracles.

Tartara ! C’est le cri que poussaient les prophètes du Dauphiné en allant à la bataille. Ce cri devait, disaient-ils, leur assurer la victoire et mettre leurs ennemis en déroute. Le contraire arriva[1].

Tartare, enfer des anciens. Ils le plaçaient sous la terre, qu’ils croyaient plate, à une telle profondeur, dit Homère, qu’il est aussi éloigné de la terre que la terre l’est du ciel. Virgile le dépeint vaste, fortifié de trois enceintes de murailles et entouré du Phlégéton. Une haute tour en défend l’entrée. Les portes en sont aussi dures que le diamant ; tous les efforts des mortels et toute la puissance des dieux ne pourraient les briser… Tisiphone veille toujours à leur garde et empêche que personne ne sorte, tandis que Rhadamanthe livre les criminels aux furies. L’opinion commune était qu’il n’y avait plus de retour pour ceux qui se trouvaient une fois précipités dans le Tartare. Platon est d’un autre avis : selon lui, après qu’ils y ont passé une année, un flot les en retire et les ramène dans un lieu moins douloureux.

Tartini. Le célèbre musicien Tartini se couche ayant la tête échauffée d’idées musicales. Dans son sommeil lui apparaît le diable jouant une sonate sur le violon. Il lui dit : « Tartini, joues-tu comme moi ? » Le musicien, enchanté de cette délicieuse harmonie, se réveille, court à son piano et compose sa plus belle sonate, celle du diable.

Tasso (Torquato). Il croyait à l’astrologie judiciaire. « J’ai fait considérer ma naissance par trois astrologues, dit-il dans l’une de ses lettres, et, sans savoir qui j’étais, ils m’ont représenté d’une seule voix comme un grand homme dans les lettres, me promettant très-longue vie et très-haute fortune ; et ils ont si bien deviné les qualités et les défauts que je me connais à moi-même, soit dans ma complexion, soit dans mes habitudes, que je commence à tenir pour certain que je deviendrai un grand homme. » Il écrivait cela en 1576. On sait quelle fut sa haute fortune et sa très-longue vie ! Il mourut en 1595, âgé de cinquante-deux ans. Il se disait doté d’un esprit familier.

Tatien, hérétique du deuxième siècle, chef des encratites, qui attribuaient au démon la plantation de la vigne et l’institution du mariage.

Taupe. Elle jouait autrefois un rôle important dans la divination. Pline a dit que ses entrailles étaient consultées avec plus de confiance que celles d’aucun autre animal. Le vulgaire attribue encore à la taupe certaines vertus. Les plus merveilleuses sont celles de la main taupée, c’est-à-dire qui a serré une taupe vivante jusqu’à ce qu’elle soit étouffée. Le simple attouchement de cette main encore chaude guérit les douleurs de dents et même la colique. Si on enveloppe un des pieds de la taupe dans une feuille de laurier et qu’on la mette dans la bouche d’un cheval, il prendra aussitôt la fuite, saisi de peur. Si on la met dans le nid de quelque oiseau, les œufs deviennent stériles.

De plus, si on frotte un cheval noir avec de l’eau où aura cuit une taupe, il deviendra blanc[2]

Tauses. En pays allemands, les tauses sont des esprits malins qui donnent le cauchemar en s’appuyant sur les bonnes gens pendant le sommeil.

Tavides, caractères que les insulaires des Maldives regardent comme propres à les garantir des maladies. Ils s’en servent aussi comme des philtres, et prétendent, par leur moyen, inspirer de l’amour.

Taymural, roi de Perse qui, dans les temps fabuleux, relégua les génies dans le Ginnistan. Voy. Génies.

Tée, génie protecteur, que chaque famille otahitienne adore, et qui passe pour un des aïeux ou des parents défunts. On attribue à ces esprits le pouvoir de donner ou de guérir les maladies.

Tehuptehuh, génie auquel les Boutaniens attribuent la construction d’un pont de chaînes de fer qui se trouve dans les montagnes du Boutan.

Tell. Dans une des montagnes sauvages de la Suisse, auprès du lac Waldstœtten, il y a une grotte où les habitants croient que reposent les trois sauveurs de la Suisse, qu’ils appellent les trois Tell. Ils portent encore les anciens vêtements, et reviendront une seconde fois au se-

  1. Voyez les prophètes du Dauphiné, dans les Légendes infernales.
  2. Les admirables secrets d’Albert le Grand, p. 114.