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SUR
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la part d’un sorcier qu’on ne connaît point, qu’on pende son habit à une cheville, et qu’on frappe dessus avec un bâton de sureau : tous les coups retomberont sur l’échine du sorcier coupable, qui sera forcé de venir, en toute hâte, ôter le maléfice.

Surtur, génie qui doit, selon les Celtes, revenir, à la fin du monde, à la tête des génies du feu, précédé et suivi de tourbillons enflammés ; il pénétrera par une ouverture du ciel, brisera le pont Bifrost, et, armé d’une épée plus étincelante que le soleil, combattra les dieux, lancera des feux sur toute la terre, et consumera le monde entier. Il aura pour antagoniste le dieu Frey, qui succombera. Voy. Bifrost.

Sustrugiel, démon qui, selon les Clavicules de Salomon, enseigne l’art magique et donne des esprits familiers.

Suttée. C’est le nom qu’on donne dans l’Inde au sacrifice d’une veuve par le feu. Ces sacrifices sont rarement volontaires. Un voyageur anglais écrivait en 1836 :

« Une tentative de suttée a eu lieu le mois dernier (avril) hors des murs de Jeypore. J’en ai été averti à temps, et je vis un grand concours de peuple qui se portait de la ville à Murda-Haida. J’appris que ces gens allaient voir une suttée. La femme était sur le bûcher. Dès que les flammes l’y gagnèrent, elle s’en élança et y fut rejetée. Elle s’en arracha une seconde fois. On la replongea de nouveau dans le feu, elle s’en sauva une troisième fois. La police de Jeypore intervint alors, et renvoya l’affaire au Rawul, qui ordonna de ne plus employer la force. La veuve fut sauvée en conséquence, et puis se réfugia dans un de nos hôpitaux ; sans quoi elle eût été chassée du district. C’est, entre beaucoup d’autres preuves, une preuve nouvelle que le sacrifice est, dans un grand nombre de circonstances, un meurtre prémédité de la part des parents de la victime… »

Swedenborg (Emmanuel), célèbre visionnaire suédois.

« Nous ne savons guère, en France, qu’une chose de Swedenbord, dit M. Émile Souvestre, c’est que, dînant un jour de bon appétit dans une taverne de Londres, il entendit la voix d’un ange qui lui criait : « Ne mange pas tant ! » et qu’à partir de cet instant il eut des extases qui l’emportèrent régulièrement au ciel plusieurs fois par semaine. Selon quelques auteurs, l’illuminé suédois fut un des savants les plus distingués des temps modernes, et celui qui, après Descartes, remua le plus d’idées nouvelles. Ce fut Swedenborg qui, dans un ouvrage intitulé Opera philosophica et mineralia, publié en 1737, entrevit le premier la science à laquelle nous avons donné depuis le nom de géologie. La seconde partie de son livre contient un système complet de métallurgie, auquel l’Académie des sciences a emprunté tout ce qui a rapport au fer et à l’acier dans son Histoire des arts et métiers. Il composa aussi plusieurs ouvrages sur l’anatomie (ce qui est un nouveau trait de ressemblance entre lui et Descartes), et sembla même indiquer, dans un chapitre sur la pathologie du cerveau, le système phrénologique auquel le docteur Gall dut plus tard sa célébrité. Il publia enfin, sous le titre de Dædalus hyperboreus, des essais de mathématiques et de physique qui fixèrent l’attention de ses contemporains.

 
 

» Il parlait les langues anciennes, plusieurs langues modernes, les langues orientales, et passait pour le plus grand mécanicien de son siècle. Ce fut lui qui fit amener par terre, au siège de Frédérick-Hall, en se servant de machines de son invention, la grosse artillerie qui n’avait pu être transportée par les moyens ordinaires.

» Loin d’être écrits dans un langage mystique, comme on le croit communément, la plupart des traités religieux de Swedenborg se recommandent parla méthode, l’ordre et la sobriété. Ils peuvent se partager en quatre classes, que l’on n’aurait jamais dû confondre : la première renferme les livres d’enseignement et de doctrine ; la seconde, les preuves tirées de l’Écriture sainte ; la troisième, les arguments empruntés à la métaphysique et à la morale religieuse ; enfin, la quatrième, les révélations extatiques de l’auteur. Les ouvrages compris dans cette dernière catégorie sont les seuls qui affectent la forme apocalyptique, et dont l’extravagance puisse choquer. »

Swedenborg fit toutefois, dans sa mysticité, une religion, comme en font tous les illuminés. De même qu’il avait devancé les savants dans quelques découvertes mathématiques, il a été aussi le précurseur des philosophes d’aujourd’hui. Il a