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Bresse. Il était né auprès de Montpellier ; il mourut dans un naufrage en 1314.

La chimie lui doit beaucoup de découvertes ; il ne cherchait, à la vérité, que la pierre philosophale et ne songeait qu’à faire de l’or ; mais il trouva les trois acides sulfurique, muriatique et nitrique. Il composa le premier de l’alcool et du ratafia ; il fit connaître l’essence de térébenthine, régularisa la distillation, etc. Il mêlait à ses vastes connaissances en médecine des rêveries astrologiques, et il prédit la fin du monde pour l’année 1335.

On l’accusa aussi de magie. François Pegna dit qu’il devait au démon tout ce qu’il savait d’alchimie, et Mariana[1] lui reproche d’avoir essayé de former un homme avec de certaines drogues déposées dans une citrouille. Mais Delrio justifie Arnauld de Villeneuve de ces accusations ; et le pape Clément V ne l’eût pas pris pour son médecin s’il eût donné dans la magie. — L’inquisition de Tarragone fit brûler ses livres frois ans après sa mort, mais elle les fit brûler comme étant empreints de plusieurs sentiments hérétiques.

On recherche d’Arnauld de Villeneuve un traité de l’explication des songes[2] ; mais on met sur son compte beaucoup d’ouvrages d’alchimie ou de magie auxquels il n’a pas en la moindre part. Tels sont : le livre des Ligatures physiques[3], qui est une traduction d’un livre arabe ; et celui des Talismans des douze signes du zodiaque[4]. On lui attribue aussi faussement le livre stupide et infâme des Trois imposteurs.

Arnold (Paul), vampire. Voy. Paul.

Arnoux, auteur d’un volume in-12 publié à Rouen en 1630, sous le titre des Merveilles de l’autre monde, ouvrage écrit dans un goût bizarre et propre à troubler les imaginations faibles par des contes de visions et de revenants.

Arnuphis, sorcier égyptien. Voyant Marc-Aurèle et son armée engagés dans des défilés dont les Quades fermaient l’issue, et mourant de soif sous un ciel brûlant, il fit tomber, par le moyen de son art, une pluie prodigieuse qui permit aux Romains de se désaltérer, pendant que la grêle et le tonnerre fondaient sur les Quades et les contraignaient à rendre les armes. C’est ce que racontent, dans un but intéressé, quelques auteurs païens. D’autres font honneur de ce prodige aux impuissantes prières de Marc-Aurèle. Les auteurs chrétiens, les seuls qui soient ici dans la vérité, l’attribuent unanimement, et avec toute raison, à la prière des soldats chrétiens qui se trouvaient dans l’armée romaine.

Arnus, devin tué par Hercule, parce qu’il aisait le métier d’espion. Apollon vengea la mort d’Arnus, qu’il inspirait, en mettant la peste dans le camp des Iiéraclides. ІГfallut, pour faire cesser le fléau, établir des jeux en l’honneur du défunt.

Arot. Voy. Marot.

Arphaxat, sorcier perse, qui fut tué d’un coup de foudre, si l’on en croit Abdias de Babylone[5], à l’heure même du martyre de saint Simon et de saint Jude. — Dans la possession de Loudun, on a vu un démon Arphaxat.

Art de saint Anselme, moyen superstitieux de guérir, employé par des imposteurs qui prenaient le nom d’anselmisles. Ils se contentaient de toucher, avec certaines paroles, les linges qu’on appliquait sur les blessures. Ils devaient le secret de leur art, disaient-ils, à saint Anselme de Cantorbéry. Aussi l’appelaient-ils l’art de saint Anselme, voulant de la sorte se donner un certain vernis. Mais Delrio assure que leur véritable chef de file est Anselme de Parme. Voyez ce mot.

Art de saint Paul, moyen de prédire les choses futures, que des songe-creux ont prétendu avoir été enseigné à saint Paul dans son voyage au troisième ciel. Des charlatans ont eu le front de s’en dire héritiers.

Art des Esprits, appelé aussi art angélique. Il consiste dans le talent d’évoquer les esprits et de les obliger à découvrir les choses cachées. D’autres disent que l’art angélique est l’art de s’arranger avec son ange gardien, de manière à recevoir de lui la révélation de tout ce qu’on veut savoir. Cet art superstitieux se pratique de deux manières : ou par des extases, dans lesquelles on reçoit des avis, ou par des entretiens avec l’ange que l’on évoque, qui apparaît, et qui en cette circonstance n’est probablement pas un ange de lumière. Voy. Évocations.

Art notoire, espèce d’encyclopédie inspirée. Le livre superstitieux qui contient les principes de l’art notoire promet la connaissance de toutes les sciences en quatorze jours. L’auteur du livre dit effrontément que le Saint-Esprit le dicta à saint Jérôme. Il assure encore que Salomon n’a obtenu la sagesse et la science universelle que pour avoir lu en une seule nuit ce merveilleux livre. Il faudrait qu’il eût déjà été dicté à quelque enfant d’Israël ; car ce serait un prodige trop grand que Salomon eût lu le manuscrit de saint Jérôme. Mais les faiseurs d’écrits de ce genre ne reculent pas pour si peu.

Gilles Bourdin a publié, au seizième siècle, un grimoire obscur sous le titre de l’Art notoire. Il n’est pas probable que ce soit la bonne copie, qui sans doute est perdue.

Delrio dit que de son temps les maîtres de cet art ordonnaient à leurs élèves une sorte de

  1. Rerum hispanar., lib. XIV, c. ix.
  2. Arnaldi de Villanova libellus de somniorum interpretatione et somnia Danielis, in-4o. Ancienne édition très-rare.
  3. De physicis ligaturis.
  4. De sigillis duodecim signorum.
  5. Certaminis apostolici, lib. VI.