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pitre des légendes bien naïves. Il y avait à Bonn, dit Gésaire d’Heisterbach, un prêtre remarquable par sa pureté, sa bonté et sa dévotion. Le diable se plaisait à lui jouer de petits tours de laquais ; lorsqu’il lisait son bréviaire, l’esprit malin s’approchait sans se laisser voir, mettait sa griffe sur la leçon du bon curé et l’empêchait de finir ; une autre fois il fermait le livre, ou tournait le feuillet à contre-temps. Si c’était la nuit, il soufflait la chandelle. Le diable espérait se donner la joie de mettre sa victime en colère ; mais le bon prêtre recevait tout cela si bien et résistait si constamment à l’impatience, que l’importun esprit fut obligé de chercher une autre dupe[1].

Cassien parle de plusieurs esprits ou démons de la même trempe qui se plaisaient à tromper les passants, à les détourner de leur chemin et à leur indiquer de fausses routes, le tout par malicieux divertissement[2].

Un baladin avait un démon familier qui jouait avec lui et se plaisait à lui faire des espiègleries. Le matin il le réveillait en tirant les couvertures, quelque froid qu’il fît ; et quand le baladin dormait profondément, son démon l’emportait hors du lit et le déposait au milieu de la chambre[3]. Pline parle de quelques jeunes gens qui furent tondus par le diable. Pendant que ces jeunes gens dormaient, des esprits familiers, vêtus de blanc, entraient dans leurs chambres, se posaient sur leur lit, leur coupaient les cheveux proprement, et s’en allaient après les avoir répandus sur le plancher[4].

Malin. C’est une des épithètes qu’on donne volontiers au démon, appelé souvent l’esprit malin : elle est prise dans son plus mauvais sens.

Malina. Voy. Anninga.

Mallebranche, marqueur du jeu de paume, demeurant en la rue Sainte-Geneviève, à Paris, lequel fut, le 11 décembre 1618, visité par un revenant. C’était sa femme, morte depuis cinq ans. Elle lui donna de bons conseils qui redressèrent sa mauvaise vie, mais parla sans se montrer. On a fait là-dessus une brochure in-12, intitulée Histoire nouvelle et remarquable de l’esprit d’une femme qui s’est apparue au faubourg Saint-Marcel, après qu’elle a demeuré cinq ans entiers ensevelie : elle a parlé à son mari, lui a commandé de faire prier pour elle, ayant commencé de parler le mardi 11 décenbre 1618. Paris, in-12, 1618[5].

Malphas, grand président des enfers, qui apparaît sous la forme d’un corbeau. Quand il se montre avec la figure humaine, le son de sa voix est rauque ; il bâtit des citadelles et des tours inexpugnables, renverse les remparts ennemis, fait trouver de bons ouvriers, donne des esprits familiers, reçoit des sacrifices et trompe les sacrificateurs : quarante légions lui obéissent.

Malphas.


Mambrés, célèbre enchanteur de l’Égypte, un de ceux que Moïse confondit par ses miracles.

Mammon, démon de l’avarice : c’est lui, dit Milton, qui, le premier, apprit aux hommes à déchirer le sein de la terre pour en arracher les trésors.

Mammon.


Mammouth, animal dont la race est perdue. Voici sur ce monstre une tradition des indigènes de l’Amérique du Nord :

« Il y a dix mille lunes que cette terre était couverte de forêts épaisses. Des bandes de bêtes féroces et des hommes aussi libres qu’elles étaient les seuls maîtres du pays. Il existait une race d’animaux grands comme un précipice, cruels comme des panthères, légers comme l’aigle ; les

  1. Cœsarii Heisterb. miracul., lib. V, cap. liii.
  2. Cassiani collat. VII, cap. xxxii.
  3. Guillelmi Parisiensis partis II princip., cap. viii.
  4. Plin., lib. XVI, epist. xxvii.
  5. Voyez cette aventure résumée dans les Légendes des esprits et démons.