Page:Jacques Collin de Plancy - Dictionnaire infernal.pdf/430

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LUT
LYn
— 422 —

Les lutins s’appelaient ainsi parce qu’ils prenaient quelquefois plaisir à lutter avec les hommes. Il y en avait un à Thermesse qui se battait avec tous ceux qui arrivaient dans cette ville. Au reste, disent les bons légendaires, les lutins ne mettent ni dureté ni violence dans leurs jeux… Voy. Elfes, etc.

Lutschin. Au pied de Lutschin, rocher gigantesque de la Suisse, coule un torrent où se noya un fratricide en voulant laver son poignard ensanglanté. La nuit, à l’heure où le meurtre fut commis, on entend encore près du torrent des soupirs et comme le râle d’un homme qui se meurt. On se dit aussi que l’âme du meurtrier rôde dans les environs, cherchant un repos qu’elle ne peut trouver.

Lutteurs, démons qui aiment la lutte et les petits jeux de mains. C’est de leur nom qu’on a nommé les lutins.

Luxembourg (François de Montmorency), maréchal de France, né en 1628, mort en 1695. On l’accusa de s’être donné au diable. Un de ses gens, nommé Bonard, voulant retrouver des papiers qui étaient égarés, s’adressa à un certain Lesage pour les retrouver. Ce Lesage était un homme dérangé, qui se mêlait de sorcellerie et de divination/ Il lui ordonna d’aller visiter les églises, de réciter des psaumes ; Bonard se soumit à tout ce qu’on exigeait de lui, et les papiers ne se retrouvèrent pas. Une fille, nommée la Dupin, les retenait. Bonard, sous les yeux de Lesage, fit une conjuration au nom du maréchal de Luxembourg ; la Dupin ne rendit rien. Désespéré, Bonard fit signer un pacte au maréchal qui se donnait au diable. À la suite de ces menées, la Dupin fut trouvée assassinée. On en accusa le maréchal. Le pacte fut produit au procès. Lesage déposa que le maréchal s’était adressé au diable et à lui pour faire mourir la Dupin. Les assassins de cette fille avouèrent qu’ils l’avaient découpée en quartiers et jetée dans la rivière par les ordres du maréchal. La cour des pairs devait le juger ; mais on mit de la négligence à instruire son procès ; enfin on lui confronta Lesage et un autre sorcier, nommé Davaux, avec lesquels on l’accusa d’avoir fait des sortilèges pour faire mourir plus d’une personne. — Parmi les imputations horribles qui faisaient la base du procès, Lesage dit que le maréchal avait fait un pacte avec le diable, pour pouvoir allier un de ses fils avec la famille de Louvois. Le procès dura quatorze mois. Il n’y eut de jugement ni pour ni contre. La Voisin, la Vigoureux et Lesage, compromis dans ces crimes, furent brûlés à la Grève. Le maréchal de Luxembourg fut élargi, passa quelques jours à la campagne, puis revint à la cour et reprit ses fonctions de capitaine des gardes…

Luxembourg (la maréchale de). Madame la maréchale de Luxembourg avait pour valet de chambre un vieillard qui la servait depuis longtemps, et auquel elle était attachée. Ce vieillard tomba tout à coup dangereusement malade. La maréchale était dans l’inquiétude. Elle ne cessait d’envoyer demander des nouvelles de cet homme, et souvent allait elle-même en savoir. Se portant très-bien, elle s’éveille au milieu de la nuit avec une agitation singulière ; elle veut sonner pour demander ce que fait son valet de chambre ; elle ouvre les rideaux de son lit ; à l’instant, l’imagination fortement frappée, elle croit apercevoir dans son appartement un fantôme couvert d’un linceul blanc ; elle croit entendre ces paroles : — Ne vous inquiétez point de moi, je ne suis plus de ce monde, et avant la Pentecôte vous viendrez me rejoindre. « La fièvre s’empara d’elle ; elle fut bientôt à toute extrémité. Ce qui contribua le plus à augmenter sa terreur, c’est qu’à l’instant même où elle fut frappée de cette vision, l’homme en question venait effectivement d’expirer. La maréchale a cependant survécu à la prédiction du fantôme imaginaire, et cette résurrection fait furieusement de tort aux spectres pour les choses de l’avenir[1]. »

Lycanthropie, transformation d’un homme en loup. Le lycanthrope s’appelle communément loup-garou. Voy. Loups-garous.

Lycaon, fils de Phorénée, roi d’Arcadie, à laquelle il donna le nom de Lycaonie. Il bâtit sur les montagnes la ville de Lycosure, la plus ancienne de toute la Grèce, et y éleva un autel à Jupiter Lycseus, auquel il commença à sacrifier des victimes humaines. Il faisait mourir, pour les manger, tous les étrangers qui passaient dans ses États. Jupiter étant allé loger chez lui, Lycaon se prépara à ôter la vie à son hôte pendant qu’il serait endormi ; mais auparavant il voulut s’assurer si ce n’était pas un dieu et lui fit servir à souper les membres d’un de ses hôtes, d’autres disent d’un esclave. Un feu vengeur, allumé par l’ordre de Jupiter, consuma bientôt le palais, et Lycaon fut changé en loup. C’est le plus ancien loup-garou.

Suivant quelques traditions, il reprenait la figure d’homme au bout de dix ans, si, dans ces dix ans, il s’était abstenu de chair humaine.

Lycas, démon de Thémèse, chassé par le champion Euthymius, et qui fut en grande renommée chez les Grecs. Il était très-noir, avait le visage et tout le corps hideux, et portait une peau de loup pour vêtement[2].

Lychnomancie, divination qui se faisait par l’inspection de la flamme d’une lampe ; il en reste quelques traces. Lorsqu’une étincelle se détache de la mèche, elle annonce une nouvelle et la direction de cette nouvelle. Voy. Lampadomancie.

Lynx. Les anciens disent des merveilles du lynx. Non-seulement ils lui attribuent la faculté

  1. Histoire des revenants ou prétendus tels, t. I, p. 474.
  2. Leloyer, Histoire des spectres, p. 4 98.