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FAT
FAU
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Mais en rentrant dans la maison de sa marâtre, ce jeune guerrier trouva sa femme, qu’il chérissait uniquement, percée d’un coup d’épée, expirante et sans oreilles…

Mais beaucoup et la plupart des fascinations ne sont généralement que des tours d’adresse. On lit dans les Aventures de Till l’espiègle des fascinations de ce genre. Un jour, dans une foire, il paria avec un grand seigneur que, sur un signe magique qu’il allait faire, une marchande de faïence briserait toute sa boutique, ce qui eut lieu. Mais il avait payé d’avance les pots cassés. Il joua un autre tour semblable en payant un festin, au moyen de son chapeau, qu’il disait magique, et qu’il faisait pirouetter sur son doigt pour solder l’addition. Le dîner pareillement se trouvait payé d’avance.

Les femmes maures s’imaginent qu’il y a des sorciers qui fascinent par leur seul regard, et tuent les enfants. Cette idée leur est commune avec les anciens Romains, qui honoraient le dieu Fascinus, à qui l’on attribuait le pouvoir de garantir les enfants des fascinations et maléfices. Voy. Yeux, Zilon, Prestiges, etc.

Les faïences brisées


Fatalisme, doctrine de ceux qui reconnaissent une destinée inévitable. Si quelqu’un rencontre un voleur, les fatalistes disent que c’était sa destinée d’être tué par un voleur. Ainsi cette fatalité a assujetti le voyageur au fer du voleur, et a donné longtemps auparavant au voleur l’intention et la force, afin qu’il eût, au temps marqué, la volonté et le pouvoir de tuer celui-ci. Et si quelqu’un est écrasé par la chute d’un bâtiment, le mur est tombé parce que cet homme était destiné à être enseveli sous les ruines de sa maison Dites plutôt qu’il a été enfoui sous les ruines parce que le mur est tombé[1]. Où serait la liberté des hommes, s’il leur était impossible de se soustraire à une fatalité aveugle, à une destinée inévitable ? Est-il rien de plus libre que de se marier, de suivre tel ou tel genre de vie ? Est-il rien de plus fortuit que de périr par le fer, de se noyer, d’être malade ?… L’homme vertueux, qui parvient par de grands efforts à vaincre ses passions, n’a donc plus besoin de s’étudier à bien faire, puisqu’il ne peut être vicieux ?… C’est un peu la détestable doctrine de Calvin.

Faunes, dieux rustiques inconnus aux Grecs. On les distingue des satyres et sylvains, quoiqu’ils aient aussi des cornes de chèvre ou de bouc, et la forme d’un bouc depuis la ceinture jusqu’en bas. Mais ils ont les traits moins hideux, une figure plus gaie que celle des satyres, et moins de brutalité. D’anciens Pères les regardent comme des démons incubes[2] ; et voici l’histoire qu’en donnent les docteurs juifs : « Dieu avait déjà créé les âmes des faunes et des satyres, lorsqu’il fut interrompu par le jour du sabbat, en sorte qu’il ne put les unir à des corps, et qu’ils restèrent ainsi de purs esprits et des créatures

  1. Barclai, l’Argenis.
  2. Delancre, Tableau de l’inconstance des démons, etc., p. 214.