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ENN
EON
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rive à la porte, il trouve un cheval, préparé, le monte et il est transporté dans les airs, criant d’une voix terrible à ceux qui étaient présents : — À moi ! au secours !… On le perdit de vue, et on ne put douter que le diable ne l’eût emporté[1]. Dans la même ville, il y eut un bailli qui fut aussi enlevé par le diable à l’heure de son dîner et porté trois fois autour de Mâcon, à la vue de tous les habitants, qui assurent ne l’avoir pas vu revenir[2]. Ce fait est raconté par un protestant. Voy. Agrippa, Carlostad, Gabrielle d’Estrées, Luther, etc., etc.

Ennoïa, la suprême intelligence chez quelques disciples de Simon le Magicien. Voy. Ménandre.

Énoch. Voy. Hénoch.

Enrico, comte allemand qui reparut en fantôme. Voy. Armées prodigieuses.

Enrôleurs de Satan. Ceux qui s’engagent au diable s’obligent à lui amener des recrues ; comme il se fait au reste dans toute société secrète. Voy. Engagements.

Ensalmadores. Voy. Saludadores.

Ensoph, dieu suprême de la cabale juive. Il est caché dans les plus profonds abîmes de l’être. Il est tout, et pourtant il n’est rien de ce qui est. C’est lui qui a tout créé par Menra, qui est son verbe. Et Menra a produit les trois grands séphiroths ; de ces trois sont sortis les séphiroths inférieurs. Ensoph s’est manifesté dans les dix sphères qui composent l’univers ; ses émanations s’étendent sur les quatre mondes, depuis les esprits les plus hauts jusqu’à la matière la plus infime. Dans ces émanations se trouvent diverses séries d’esprits ou démons que l’on rencontre partout ; des esprits particuliers sont chargés de surveiller les soixante-dix peuples. De ces esprits, les uns sont des esprits de lumière qui ont pour chef suprême Jézer-Job ; les autres sont des esprits de ténèbres qui obéissent à Jézer-Hara. Trois intelligences supérieures, Métraton, Sandalphon et Acatries, président les phalanges des bons esprits, qui se partagent en dix chœurs et ont pour séjours les trois cieux et les sept planètes. Le chef des esprits mauvais est Samaël ou Satan, qui a pour lieutenants Asmodée et Bédargon, et pour ministres les Schédim, les Sayrim, les Malache-Chabbalah. Ces mauvais esprits ou démons ont domicile dans les sept régions de l’enfer. Les esprits de la nature (sans doute les fées, les elfes, les follets et toutes les espèces de ce genre), sont dispersés entre les bons et les mauvais esprits des séjours invisibles. Ils pullulent dans notre atmosphère et se montrent à l’occasion[3].

Ensorcellement. Bien des gens se sont crus ensorcelés, qui n’étaient que le jouet de quelque hallucination. On lisait ce fait dans le Journal des Débats du 5 mars 1841. — « Il y a trois jours, M. Jacques Coquelin, demeurant rue du Marché Saint-Jean, n° 21, à Paris, logé au troisième étage, rentrait chez lui vers onze heures du soir, la tête échauffée par le vin. Arrivé sur le palier du deuxième étage, il se croit dans son domicile ; il se déshabille tranquillement, jette une à une ses hardes par une large fenêtre donnant sur la cour et que dans son ivresse il prend pour son alcôve ; puis il se fait un bonnet de nuit avec sa cravate, et n’ayant plus que sa chemise sur le corps il se lance lui-même par la fenêtre, croyant se jeter sur son lit… Ce ne fut que le lendemain vers six heures du matin que les autres habitants de la maison s’aperçurent de ce malheureux événement. Le corps de l’infortuné Coquelin était étendu sans mouvement sur les dalles de la cour. Pourtant cet homme, âgé seulement de vingt-sept ans et doué d’une grande force physique, n’était pas mort, quoique son corps fût horriblement mutilé. Transporté chez lui, il vécut deux jours encore ; mais son état était désespéré, et il expira après soixante heures des plus cruelles souffrances. » — Dans d’autres temps ou dans d’autres pays, on eût vu là un ensorcellement. Voy. toutefois Sortilèges, Paroles, Bergers, etc., etc.

Enterrés vivants. Voy. Vampire, à la fin.

Enthousiastes. On a donné ce nom à certains sectaires qui, étant agités du démon, se croyaient inspirés.

Énus. Voy. Gunem.

Envie (L’), péché capital qui réjouit le démon, parce qu’il offense Dieu.

Envoûtement. Les sorciers font, dit-on, la figure en cire de leurs ennemis, la piquent, la tourmentent, la fondent devant le feu, afin que les originaux vivants et animés ressentent les mêmes douleurs. C’est ce que l’on appelle envoûter, du nom de la figure, vols ou voult. Voy. Vols.

Éon de l’Étoile. Dans le douzième siècle, un certain Éon de l’Étoile, gentilhomme breton, abusant de la manière dont on prononçait ces paroles : Per eum qui venturus est (on prononçait per Eon), prétendit qu’il était le fils de Dieu qui doit venir juger les vivants et les morts, se donna pour tel, eut des adhérents qu’on appela Éoniens, et qui se mirent, comme tous les novateurs, à piller les églises et les monastères.

Éons. Selon les gnostiques, les Éons sont les êtres vivants et intelligents que nous appelons des esprits. Les Grecs les nommaient démons ; ce mot a le même sens. Ces Éons prétendus étaient ou des attributs de Dieu personnifiés, ou

  1. C’est l’histoire du comte Guillaume III, qu’on peut voir, détaillée, dans les Légendes infernales.
  2. Jean de Chassanion, huguenot, Des grands et redoutables jugements de Dieu, advenus au monde, p. 116.
  3. Gorres, Mystique, liv. V, ch. ii. Tiré de l’histoire, doctrine et noms de toutes les sectes juives qui ont existé autrefois et existent encore aujourd’hui, par Beer.