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tout qui tient aux ligatures. Le septième roule sur les apparitions. L’auteur, qui ne doute peut-être pas assez, en rapporte beaucoup. Il tombe, dans le huitième traité, sur les juifs, les apostats et les athées. Dans le neuvième, il s’élève contre les hérétiques, dont l’apparition dans tous les temps a produit en effet des fanatismes plus ou moins absurdes ou abominables. Il se récrie, dans le dernier traité, contre l’incrédulité et mécréance des juges en fait de sorcellerie. Le tout est suivi d’un recueil d’arrêts notables contre les sorciers.

Tableau de Vinconstance des mauvais anges et démons, où il est amplement traité de la sorcellerie et des sorciers ; livre très-curieux et très-utile, avec un discours contenant la procédure faite par les inquisiteurs d’Espagne et de Navarre à cinquante-trois magiciens, apostats, juifs et sorciers, en la ville de Logrogne, en Castille, le 9 novembre 1610 ; en laquelle on voit combien l’exercice de la justice en France est plus juridiquement traité et avec de plus belles formes qu’en tous autres empires, royaumes, républiques et États, par P. Delancre, conseiller du roi au parlement de Bordeaux ; Paris, Nicolas Buon, 1612, in-4o d’environ 800 pages[1], très-recherché, surtout lorsqu’il est accompagné de l’estampe qui représente les cérémonies du sabbat.

Cet ouvrage est divisé en six livres ; le premier contient trois discours sur l’inconstance des démons, le grand nombre des sorciers et le penchant des femmes du pays de Labourd pour la sorcellerie. Le second livre traite du sabbat en cinq discours. Le troisième roule sur la même matière et sur les pactes des sorciers avec le diable, pareillement en cinq discours. Le quatrième livre, qui contient quatre discours, est consacré aux loups-garous ; le livre cinquième, en trois discours, aux superstitions et apparitions ; et le sixième, aux prêtres sorciers, en cinq discours.

Tout ce que ces ouvrages présentent de curieux tient sa place dans ce dictionnaire.

Delangle (Louis), médecin espagnol et grand astrologue. On raconte qu’il prédit au roi de France Charles VII la journée de Frémigny en 1450 ; il prédit aussi, selon quelques auteurs, l’emprisonnement du petit prince de Piémont, ainsi que la peste de Lyon l’année suivante. On l’accusa de superstition, quoiqu’il ne se dît qu’astrologue. Le roi le retint à quatre cents livres de pension et l’envoya pratiquer sa science à Lyon. Il fit plusieurs livres et traduisit d’espagnol en latin les Nativités, de Jean de Séville. On ajoute qu’il prévit le jour de sa mort. Il fit faire, dit-on, quinze jours d’avance son service, que l’on continua jusqu’à l’heure marquée où en effet il mourut[2].

Delphes (l’oracle de). Diodore de Sicile nous apprend l’origine des merveilles qu’on en a contées. Il arriva un jour que des chèvres s’étant approchées sur le Parnasse d’un trou d’où sortait une exhalaison forte, elles se mirent à danser. La nouveauté de la chose et l’ignorance où l’on était de la vertu naturelle de ces vapeurs firent croire qu’il y avait là-dessous du merveilleux, et que sans doute ce trou était la demeure de quelque dieu (ou démon), dont on ne devait pas négliger les inspirations. Il n’en fallut pas plus : on y bâtit un temple, on y institua un oracle, des prêtres, une pythie, des cérémonies. L’exhalaison qui montait à la tête de la prêtresse l’agitait violemment : c’était, comme le remarque Benjamin Binet, l’inspiration du dieu qui la saisissait. Elle parlait sans se faire comprendre : c’était le dieu qui combattait ses facultés. Elle revenait à elle-même et prononçait l’oracle : c’était le dieu qui, devenu le maître, parlait par son organe. La force de l’exhalaison était quelquefois si violente qu’elle faisait mourir la pythie. Plutarque en cite un exemple.

Delrio (Martin-Antoine), né à Anvers en 1551, savant jésuite, auteur d’un livre intitulé Recherches magiques[3], en six livres, où il est traité soigneusement des arts curieux et des vaines superstitions ; in-4o, Louvain, 1599, souvent réimprimé. Ce livre célèbre, qui eut dans son temps beaucoup de vogue, a été abrégé et traduit en français par André Duchesne, Paris, in-4o et in-8o, 2 vol., 1611, très-recherché. L’auteur se montre généralement plus éclairé que la plupart des écrivains de son siècle. Son ouvrage est divisé en six livrés ; le premier traite de la magie en général, naturelle et artificielle, et des prestiges ; le second, de la magie infernale ; le troisième, des maléfices ; le quatrième, des divinations et prédictions ; le cinquième, des devoirs du juge et de la manière de procéder en fait de sorcellerie ; le sixième, des devoirs du confesseur et des remèdes permis ou prohibés contre la sorcellerie. En général, ces disquisitions magiques sont un recueil de faits bizarres, mêlés de raisonnements et de citations savantes.

Déluge. Voy. Is[4].

Démence. Voy. Possession.

Démocrite, philosophe célèbre qui florissait en Grèce environ trois cents ans après la fondation de Rome. Les écrivains du quinzième et du seizième siècle l’ont accusé de magie ; quelques-uns lui ont même attribué un traité d’alchimie. Psellus prétend qu’il ne s’était crevé les yeux qu’après avoir soufflé tout son bien à la recherche de la pierre philosophale. La cécité de Démocrite a embarrassé bien des personnes. Tertullien dit qu’il se priva de la vue parce qu’elle était pour lui une occasion de mauvaises convoitises. Plu-

  1. Il y a une préface de Jean d’Espagnet.
  2. Ancien manuscrit de la bibliothèque du roi, rapporté à la fin des Remarques de Joly sur Bayle.
  3. Disquisitionum magicarum libri sex, etc., auctore Martino Delrio, etc.
  4. Pour le déluge universel, voyez les Légendes de l’Ancien Testament.