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Souvent des démons et des sorciers ont pris la forme de chèvre. Claude Chappuis de Saint-Amour, qui suivit l’ambassadeur de Henri III près la sublime Porte, conte qu’il vit sur une place publique de Constantinople des bateleurs qui faisaient faire à des chèvres plusieurs tours d’agilité et de passe-passe tout à fait admirables ; après quoi, leur mettant une écuelle à la bouche, ils leur commandaient d’aller demander la pièce, pour leur entretien, tantôt au plus beau ou au plus laid, tantôt au plus riche ou au plus vieux de la compagnie : ce qu’elles faisaient dextrement, entre quatre à cinq mille personnes, et avec une façon telle, qu’il semblait qu’elles voulussent parler. Or, qui ne voit clairement que ces chèvres étaient hommes ou femmes ainsi transmués, ou démons déguisés[1] ?… Voy. Bouc.


Chibados, secte de sorciers qui font merveille au royaume d’Angola.

Chicota, oiseau des îles Tonga, qui a l’habitude de descendre du haut des airs en poussant de grands cris. Les naturels sont persuadés qu’il a le don de prédire l’avenir. Quand il s’abaisse près d’un passant, on croit que c’est pour lui annoncer quelque malheur.

Chicus Æsculanus. Voy. Cecco d’Ascoli.

Chien. Les chiens étaient quelquefois les compagnons des magiciens. C’était le diable qui les suivait sous cette forme, pour donner moins à


soupçonner. Mais on le reconnaissait malgré ses déguisements. Léon de Chypre écrit que le diable sortit un jour d’un possédé sous la figure d’un chien noir. — C’est surtout la couleur noire que le diable prend sous une peau de chien. De bonnes gens se noient assez fréquemment à Quimper. Les vieilles et les enfants assurent que c’est le diable, en forme de gros chien noir qui précipite les passants dans la rivière[2]. Il y a beaucoup de superstitions qui tiennent au chien dans le Finistère, où les idées druidiques ne sont pas toutes éteintes. On croit encore dans le canton sauvage de Saint-Ronal que l’âme des scélérats passe dans le corps d’un chien noir. Les anciens mages croyaient aussi que les démons se montraient en forme de chiens ; et Plutarque, dans la vie de Cimon, raconte qu’un mauvais génie travesti en chien noir vint annoncer à Cimon qu’il mourrait bientôt.

Un charlatan, du vivant de Justinien, avait un chien si habile que, quand toutes les personnes d’une assemblée avaient mis à terre leurs anneaux, il les rendait sans se tromper, l’un après l’autre, à qui ils appartenaient. Ce chien distinguait aussi dans la foule, lorsque son maître le lui ordonnait, les riches et les pauvres, les gens honnêtes et les fripons : « Ce qui fait voir, dit Leloyer, qu’il y avait là de la magie, et que ce chien était un démon[3]. »

Delancre conte qu’en 1530 le démon, par le moyen d’un miroir, découvrit, à un pasteur de

  1. Delancre, Incrédulité et mécréance du sortilège pleinement convaincues, traité VI, p. 348.
  2. Cambry, Voyage dans le Finistère, t. III, p. 22.
  3. Leloyer, Histoire et discours des spectres, liv. I, ch. viii.