Page:Jacques Collin de Plancy - Dictionnaire infernal.pdf/11

Cette page a été validée par deux contributeurs.
ABE
ABR
— 3 —

noueur d’aiguillettes, et principalement comme voleur et meurtrier. Voy. Ligatures.

Aben-Ezra. Voy. Macha-Halla.

Aben-Ragel, astrologue arabe, né à Cordoue au commencement du cinquième siècle. Il a laissé un livre d’horoscopes, d’après l’inspection des étoiles, traduit en latin sous le titre De judiciis seu fatis stellarum, Venise, 1485 ; rare. On dit que ses prédictions, quand il en faisait, se distinguaient par une certitude très-estimable.

Abigor, démon d’un ordre supérieur, grand-duc dans la monarchie infernale. Soixante légions marchent sous ses ordres[1]. Il se montre sous la figure d’un beau cavalier portant la lance,

 
Abigor
Abigor
 
l’étendard ou le sceptre ; il répond habilement sur tout ce qui concerne les secrets de la guerre, sait l’avenir, et enseigne aux chefs les moyens de se faire aimer des soldats.

Abîme, et plus correctement abysme. C’est le nom qui est donné, dans l’Écriture sainte, 1o à l’enfer, 2o au chaos ténébreux qui précéda la création.

Abominations. Voy. Sabbat.

Abou-Ryhan, autrement appelé Mohammed-ben-Ahmed, astrologue arabe, mort en 330. Il passe pour avoir possédé à un haut degré le don de prédire les choses futures. On lui doit une introduction à l’astrologie judiciaire.

Aboyeurs. Il y a en Bretagne et dans quelques autres contrées des hommes et des femmes affectés d’un certain délire inexpliqué, pendant lequel ils aboient absolument comme des chiens. Quelques-uns parlent à travers leurs aboiements, d’autres aboient et ne parlent plus. Le docteur Champouillon a essayé d’expliquer ce terrible phénomène, en l’attribuant aux suites d’une frayeur violente. Il cite un jeune conscrit de la classe de 1853 qui, appelé devant le conseil de révision, réclama son exemption pour cause d’aboiement ; il racontait qu’étant mousse à bord d’un caboteur, il avait été précipité à la mer par un coup de vent ; l’épouvante l’avait frappé d’un tel anéantissement, qu’il n’en était sorti que pour subir des suffocations qui l’empêchèrent de parler pendant une semaine. Lorsque la parole lui revint, elle s’entrecoupa à chaque phrase de cris véhéments, remplacés bientôt par des aboiements saccadés qui duraient quelques secondes. Ces spasmes furent reconnus bien réels, et le conscrit fut réformé.

Mais il y a en Bretagne des aboyeuses qui apportent en naissant cette affreuse infirmité implantée dans quelques familles. Les bonnes gens voient là un maléfice, et nous ne savons comment expliquer une si triste misère.

Nous pourrions citer un homme qui, dans l’agonie qui précéda sa mort, agonie qui dura trois jours, ne s’exprima que par des aboiements et ne put retrouver d’autre langage. Mais celui-là, dans la profanation des églises, en 1793, avait enfermé son chien dans un tabernacle.

Nous connaissons aussi une famille où le père et la mère devenus muets, nous ne savons par quelle cause ni pour quelle cause, n’ont que des enfants muets. Ainsi les frères et les sœurs ne poussent que des cris inarticulés et ne s’entendent pas autrement pour les plus urgents besoins de la vie.

Abracadabra. Avec ce mot d’enchantement, qui est très-célèbre, on faisait, surtout en Perse et en Syrie, une figure magique à laquelle on attribuait le don de charmer diverses maladies et de guérir particulièrement la fièvre. Il ne fallait que porter autour du cou cette sorte de philactère, écrit dans la disposition triangulaire que voici :

ABRACADABRA
ABRACADABR
ABRACADAB
ABRACADA
ABRACAD
ABRACA
ABRAC
ABRA
ABR
AB
A

Abracax ou Abraxas, l’un des dieux de quelques théogonies asiatiques, du nom duquel on a tiré le philactère abracadabra. Abracax est représenté sur des amulettes avec une tête de coq, des pieds de dragon et un fouet à la main. Les démonographes ont fait de lui un démon, qui a la tête d’un roi et pour pieds des serpents. Les basilidiens, hérétiques du deuxième siècle, voyaient en lui leur dieu suprême. Comme ils trouvaient que les sept lettres grecques dont ils formaient son nom faisaient en grec le nombre 365, qui est celui des jours de l’année, ils plaçaient sous ses ordres plusieurs génies qui présidaient aux trois cent soixante-cinq cieux, et

  1. Wierus, in Pseudomonarchia dæm., etc.
1.