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NAPOLÉON

que les hostilités reprennent. Le lendemain, à de nouvelles offres de concessions, l’Autriche répond à son tour qu’elle est liée, qu’elle ne peut plus rien. C’est la guerre. L’armistice n’a été qu’une longue intrigue. L’Autriche passe au camp ennemi après avoir eu l’air d’exercer une médiation bienveillante, et elle rejette sur Napoléon l’échec des pourparlers. Elle y a gagné, en outre, le temps d’achever ses armements, les Russes et les Prussiens ont reçu des renforts, tandis que Bernadotte amène ses Suédois.

C’est déjà un hallali. Les rois, même le dernier en date, le beau‑frère de Joseph, se sont bien donné rendez‑vous sur la tombe de Bonaparte. Cette fois, et pour la première fois, non seulement la coalition est générale, mais elle aura le commandement unique, celui de Schwarzenberg ; elle aura un plan ; au lieu de se faire battre elle-même en détail, éviter de se mesurer avec Napoléon, si ce n’est pour l’accabler sous des forces supérieures ; attaquer de préférence ses lieutenants : « Partout où il ne sera pas, le succès est certain. » La coalition a même des idées, convoquer les peuples à la lutte pour la liberté, retourner contre la France le vocabulaire et jusqu’aux hommes de la Révolution. Moreau, le soldat de la République, est engagé dans les rangs des libérateurs. Par une transposition audacieuse, les dieux changent de camp.

Au « grand jeu de la guerre », Napoléon se retrouve égal à lui-même. On dirait que sa virtuosité s’exalte à lutter contre tant d’ennemis à la fois. S’il vainc, ce sera une des choses les plus difficiles, les plus étonnantes qu’il ait accomplies. Dès le 23 août, il a refoulé Blucher en Silésie ; la route de Berlin est ouverte à Davout et Oudinot. Le 26, il est à Dresde pour tenir tête aux deux cent mille hommes qui sont descendus de Bohême avec Schwarzenberg. Deux jours de bataille où l’empereur paie de sa personne, indifférent au danger,