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LE ROI DE ROME

du Midi, des Latins, des Germains, des Slaves, c’est la fédération continentale en marche pour contraindre la Russie à rentrer dans le devoir de l’alliance. En même temps, c’est une précaution calculée. La Prusse a longtemps inquiété l’empereur. Il l’a sentie tout près de passer au tsar. Il a effrayé Frédéric‑Guillaume, obtenu le renvoi des ministres patriotes et antifrançais les plus marquants, un traité d’alliance offensive et défensive, et 20.000 hommes pour participer à la campagne, en cas de guerre avec la Russie. L’Autriche, elle, en donnera 30.000 et recevra quelques territoires en échange. Napoléon n’a jamais douté de ce concours dont il fait honneur à la pensée de son mariage. Les Prussiens du général York et les Autrichiens de Schwarzenberg répondront en outre de la fidélité et de la tranquillité de l’Allemagne. L’empereur se flatte d’avoir songé à tout dans ses profondes combinaisons. Pourtant Frédéric-Guillaume écrit en secret à Alexandre. Il s’excuse. Il a cédé à une force et à une fatalité irrésistibles. « Si la guerre éclate, nous ne nous ferons de mal que ce qui sera nécessité stricte, nous nous rappellerons toujours que nous sommes unis, que nous devons un jour redevenir alliés. » Metternich, de son côté, communique au tsar le traité qu’il vient de signer avec la France et qui n’empêche pas la Russie et l’Autriche de « continuer à s’entendre en secret relativement à leurs vues politiques ». La garantie, la caution, c’est « l’intérêt de la monarchie autrichienne ». La coalition de 1813 n’aura pas de peine à se nouer. Dans l’ombre elle existe déjà. Pas plus que l’Angleterre, la Russie, l’Autriche ni la Prusse n’ont jamais reconnu les conquêtes essentielles de la Révolution qu’aucune paix générale, aucun Congrès n’ont ratifiées. Les traités, les alliances, les concours militaires qu’obtient Napoléon ne sont encore que des mesures de circonstance comme le mariage autrichien lui‑même. On lui cède parce qu’on le