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NAPOLÉON

qui était la réconciliation des Français, la « fusion ». Il voudrait être encore plus légitime que Louis XVI. Il voit que Marie-Louise appelle son père « Sa Sacrée Majesté Impériale ». Ce titre le fait rêver : « Le pouvoir vient de Dieu et c’est par là seulement qu’il peut se trouver placé hors de l’atteinte des hommes. » Jamais il n’y aura assez de consécrations. Et le roi de Rome est porté à Notre-Dame pour confirmer le sacre par un baptême solennel.

Ce jour-là vit un Paris silencieux, sans chaleur d’enthousiasme. Il y eut même des coups de sifflet au Carrousel. La guerre qui va recommencer, que l’on sent venir, attriste ou irrite. Le commerce va mal, la rente est bas. Et encore, si l’on savait tout, si l’on connaissait l’anxiété de l’empereur, si l’on pouvait lire dans sa pensée, le voir dans son cabinet ! Il lui échappait de dire que « si les Anglais tenaient encore quelque temps, il ne savait plus ce que cela deviendrait, ni que faire. » Que faire surtout ? Le blocus continental l’oblige à se disperser, la menace de la Russie à se concentrer. Doit‑il attendre d’être attaqué par le tsar ? Il suppute les dangers de l’inaction et les dangers de l’action. « Pour que la paix soit possible et durable, il faut que l’Angleterre soit convaincue qu’elle ne retrouvera plus d’auxiliaire sur le continent. » Par conséquent, il faut aussi qu’Alexandre soit soumis si on ne le retrouve plus loyal. Pour le soumettre, il n’y a d’autre moyen que la menace et l’on ne menace pas avec efficacité si l’on ne donne la conviction qu’on ira jusqu’à la guerre et qu’on est décidé à aller jusque-là. Une guerre de Russie, Napoléon ne pouvait s’y résoudre sans « d’intimes agitations » et de « cruels tourments d’esprit ». C’était l’ouvrage de Tilsit à refaire. Il en revenait toujours là. Parfois il en était « découragé » quelques observateurs ont dit le mot.

Il faut lire ici une page qui montre l’envers d’une gloire et d’une puissance auxquelles il semble qu’il